jeudi 23 décembre 2010

HOMÉLIE DE NOEL 2010

Aujourd’hui vous est né un Sauveur.... il est le Messie le Seigneur

Au cours de notre vie nous avons connu toutes sortes de Noëls: de très heureux quand nous étions jeunes, plus tard des moins heureux...

Certains auront été l’occasion d’une grande tristesse. Il n’est pas rare d’entendre des gens affirmer qu’ils sont hâte que Noël soit passé, car il est pour eux un jour de grande solitude, marqué surtout par un manque d’amour. Noël est pourtant une fête porteuse de joie. Elle annonce et veut apporter la paix du coeur non seulement aux gens qui sont heureux mais aussi -et surtout-à ceux qui ne le sont pas.

Nous venons d’entendre saint Luc raconter comment Jésus est né à Bethléem, et dans quelles circonstances, il y a plus de 2000 ans. L’évangéliste nous parle de Marie, de Joseph, de Jésus. Il nous parle aussi des bergers qui passaient la nuit dans les champs pour garder leurs troupeaux. Très pauvres, les bergers n’allaient jamais au Temple. Ils étaient tenus à l’écart et souvent méprisés. Personne ne se vantait de les fréquenter. Le Seigneur les choisit pourtant et les enveloppe de la lumière de sa gloire. C’est à eux que l’Ange leur annonce cet extraordinaire message qu retentit encore aujourd’hui partout dans le monde: “Aujourd’hui vous est né un Sauveur.... il est le Messie le Seigneur”. Les bergers vont se rendre à Bethléem où ils découvriront l’enfant et Marie, un moment de très grande joie pour eux. Ils savent maintenant qu’ils ne sont pas n’importe qui. Ils sont sûrs maintenant d’être aimés de Dieu. Ils s’émerveillent en réalisant que cet enfant vient de naître précisément pour les rendre heureux.

Pour bien célébrer Noël et le vivre comme un temps de joie et de bonheur, ne devrions-nous pas imiter les bergers dans leur simplicité? Ne devrions-nous pas approcher de la crèche avec un coeur d’enfants et accueillir le message de l’Ange?

Quand nous approchons, que voyons-nous? Souvent les enfants sont attirés par la présence de l’âne et du boeuf. Ces deux animaux ne sont certes pas les personnages les plus importants de la crèche: ils n’apparaissent même pas dans le récit évangélique... Mais ils donnent à penser que c’est pour tout l’univers créé et tout être vivant que Jésus est né. Pour être à la page il faudrait ajouter aujourd’hui une carte de l’univers avec toutes ces galaxies dont certaines portent peut-être des êtres capables de penser...

Dans la crèche il y a surtout Marie et Joseph. La jeune femme qui a cru aux paroles de l’ange Gabriel. Elle a laissé l’Esprit-Saint habiter en elle et a donné naissance au Fils de Dieu. Il y a aussi cet homme à qui Dieu a parlé dans son sommeil. Ces grands croyants sont pour nous des modèles. Devant la crèche remercions-les de s’être rendus pleinement disponibles aux désirs de Dieu, sans trop savoir où cela les conduirait. Demandons-nous ce que le Père attend maintenant de nous, pour que le mystère de la naissance de son Fils soit annoncé au monde qui, autant qu’autrefois, est pour nous en quête de joie, de bonheur, d’amour, d’espérance et de salut.

Le personnage le plus important de la crèche est évidemment le petit enfant de Marie. Contemplons-le longuement, réalisons qui il est, même si ça ne va pas de soi, dans un premier temps. Avant d’être fils de Marie, il est Fils de Dieu. Un enfant tout fragile, mais remarquez les lectures qui lui donnent aujourd’hui des titres étonnants: Merveilleux Conseiller, Dieu fort, Père-à-jamais, Prince de la Paix, le Messie, le Seigneur.... Tout le sens de notre libération est là...

Les bergers trouveront Jésus emmailloté et couché dans une mangeoire. Elle est importante cette mangeoire, elle a valeur de signe. Elle nous dit que le Fils de Dieu est venu sur terre en se dépouillant et en se mettant d’abord au service des pauvres, des petits, des plus malheureux. La joie de Noël est assurément offerte à tout le monde, mais d’abord à tous les démunis que Jésus a rencontrés et de qui il s’est approché durant sa vie. Ne sommes-nous pas des pauvres à certains égards.... pensons aussi à nos frères et soeur d’Haïti.

Après avoir contemplé le Jésus de la crèche, prions-le. Pour que son désir de vivre en nous se réalise. Un poète allemand a écrit une phrase merveilleuse au sujet de Noël: “Christ serait-il né mille fois à Bethléem, s’il ne naît pas en toi, c’est en vain qu’il est né”. Prions donc pour le Christ naisse en nous. Prions aussi pour les personnes avec lesquelles nous vivons et pour celles que nous rencontrons le plus souvent, ou celles pour qui Noël ne veut rien dire. Pensons à ce que ces personnes sont pour nous, à ce que nous sommes pour elles. Nommons ceux et celles que nous voulons confier au Fils de Dieu, ceux et celles qui vivent actuellement des jours difficiles.

Élargissons ensuite notre prière. Présentons au Christ tous les gens de notre quartier, de notre village, de notre ville, de notre province, de notre pays, du monde entier et plus loin encore peut-être! Prions pour qu’arrive enfin ce que le pape Jean-Paul II avait appelé “la civilisation de l’amour....”

N’oublions pas de prier pour notre Église. Elle vit des temps difficiles. Demandons au fils de Marie de nous aider à réaliser que, chacun et chacune pour notre part, nous sommes responsables de la vitalité de cette Église. En reprenant les mots de s. Paul, demandons-lui de nous purifier et de faire de nous “son peuple, un peuple ardent à faire le bien”. Heureux Noël à chacune et chacun d’entre vous!

vendredi 10 décembre 2010

HOMÉLIE DU DIMANCHE 12 dec. 2010

Les signes de Jésus

“Es-tu celui qui doit venir?” Jean-Baptiste et ses disciples se questionnent au sujet de l’identité et de la mission de Jésus. Leur question est en rapport avec l’attente d’un Messie en Israël, dans le fil de la tradition biblique. Mais, à nos oreilles d’aujourd’hui, comment peut résonner cette question? Nous vivons dans un monde bien différent. Après 2000 ans de christianisme, combien de peuple, combien de personnes ne partagent pas notre regard sur Jésus de Nazareth en qui nous, nous reconnaissons le Christ vivant. Globalement les medias le considèrent comme un maître spirituel du passé, un rabbi du premier siècle, un sage, un philosophe ou un personnage mythique inventé de toutes pièces. Même des chrétiens voient Jésus comme un grand personnage, mais dont l’influence est limitée Un point c’est tout!

Certes, notre foi se fonde sur le témoignage des premiers disciples, mais reconnaissons-nous en Jésus celui qui doit venir pour l’humanité de notre 21e siècle. A quels signes voyons-nous que sa vie, sa mort et sa résurrection continuent d’ouvrir pour nous un avenir différent?

Plus encore, en ce temps de l’Avent (3e semaine), chacun et chacune de nous est invité à se demander: le Christ est-il venu réellement dans ma vie? A quels signes puis-je reconnaître qu’il apporte aujourd’hui le salut en moi et autour de moi? A la question de Jean, Jésus ne répond pas par une grande déclaration à son propre sujet. Il les invite plutôt à écouter et à regarder les fruits de son action. Il reprend le même genre d’énumération que nous avons entendu dans la 1ère lect. ou dans le psaume. Ce sont les signes de l’avènement du Royaume déjà en marche. “Les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent”... La Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres... Mais que signifient ces signes pour nous concrètement aujourd’hui? Faut-il les comprendre au sens littéral et se mettre en quête de guérisons miraculeuses dans notre communauté. Oui, mais à notre époque ce sont des signes plus larges...

Notons bien que les signes du Royaume concernent aussi des corps fatigués, des perceptions faussées, des élans diminués, des relations coupées. Toutes les dimensions de la personne sont concernées. Par exemple: la personne qu’on dit aveugle se sent vulnérable quand elle sort de ses habitudes (par exemple dans telle fonction publique, tel travail de bureau). Elle est incapable de voir l’expression de la personne qui lui parle d’autres choses. Il y a des terrains sur lesquels elle ne s’avance pas. La noirceur ne vient-elle pas du manque d’attention ou de lucidité, du mensonge, du manque d’intérêt aux autres? Cette sorte d’aveuglement a des répercussions importantes sur la capacité de vivre en vérité avec soi, avec les autres et avec Dieu. L’aveuglement physique moins fréquent nous renvoie à une autre dimension de l’expérience humaine, encore plus fondamentale... La difficulté de s’ouvrir à d’autres dimensions.

Les signes de Jésus ne se limitent pas à la réparation des nerfs, des os, des muscles. Dans son regard compatissant s’exprime l’accueil doux et bienveillant que réserve Dieu à toutes nos infirmités, même les plus intimes. Il perçoit aussi les désirs de vie en plénitude qui se trouvent blessés, contrariés, même éteints chez les personnes. Par l’action de son Esprit au coeur de ce qui nous fait le plus souffrir, il nous guérit encore aujourd’hui, nous redresse, nous libère, nous remet en marche. La vie nouvelle qu’il nous communique vient transfigurer la mort qui nous menace de l’intérieur. C’est tout le mystère pascal qui est à l’oeuvre en ce temps de Noël.

Plongés dans la mort et la résurrection du Christ depuis notre baptême, nous sommes appelés à le laisser venir en nous afin qu’il change progressivement nos coeurs et influence nos actions. Habités par l’Esprit qui nous apprend à aimer les autres comme Dieu nous aime, nous laissons progressivement nos attitudes et nos dispositions se transformer. Il s’agit de nous mettre à la suite du Christ: combattre le mal par notre générosité, libérer la parole, lutté pour la justice. En dépit de nos limites, de nos blessures, de nos fermetures, le Christ fait venir le Royaume dans nos relations et nos actions. Nous n’arrivons pas à faire tout le bien qu’on souhaiterait, nous commettons même le mal que nous promettions d’éviter. Mais Jésus nous accueille avec notre misère et nos aspirations contrariées. Il nous guérit de l’intérieur pour que nous laissions un peu plus transparaître son amour. A même nos blessures, il crée en nous plus d’ouvertures aux autres, un don de soi plus spontanée, plus libre, plus gratuit. La venue du Seigneur se poursuit ainsi et nous pouvons discerner plus clairement autour de nous les signes de son Royaume.

Traditionnellement on associe le 3e dimanche de l’Avent à la joie. Notre attente est pleine d’espérance. Le Seigneur est déjà à l’oeuvre parmi nous. Aujourd’hui encore, il accomplit des signes de vie nouvelle. Le coeur est à la louange, continuons la célébration de l’Eucharistie.

Un mot en terminant: cet après midi à 14h00 (12/12/10), célébration du pardon à l’église Ste-Praxède. Quatre prêtres seront à votre disposition pour invoquer la réconciliation dont nous avons besoin et accueillir le pardon de Dieu requis pour bien vivre Noël. A 16h30 des jeunes du Cegep donneront un concert dont les profits iront à nos frères et soeurs d’Haïti. Ce sera la clôture de notre projet pour cette année. Notre contribution à l’amélioration de la vie de nos frères et soeurs d’Haïti, aussi modeste soit-elle, est un signe de l’arrivée du Royaume parmi nous. Amen!

samedi 4 décembre 2010

HOMÉLIE DU DIMANCHE 05 dec. 2010

Dieu et notre Seigneur Jésus

Des gens qui sont des spécialistes de l’Écriture ont eu la tentation d’opposer la rigueur et la sévérité de l’Ancien T. à la miséricorde et à la douceur dans le Nouveau T. Ils ont mis en opposition le Dieu du ciel, lointain mystérieux, et Jésus, plus proche de nous. Ce passage de l’Evangile, comme d’ailleurs certaines paroles assez fortes de Jésus, met en défaut cette lecture un peu simpliste. Dans l’A.T. comme dans le Nouveau, nous trouvons la force et la bonté, la rigueur et la patience, la sévérité et la miséricorde de Dieu. L’Écriture, l’Ancien et le Nouveau T. forme un tout; elle est une, car c’est le même Dieu qui s’y révèle, qui nous aime et qui veut nous sauver. C’est vrai encore aujourd’hui.

Comme le dit s. Paul dans la lettre aux Romains: “Tout ce que les livres saints ont dit avant nous est écrit pour nous instruire”. Mais alors, comment concilier, comment réconcilier cette image d’un Dieu sévère et exigeant, tel que nous le présente aujourd’hui Jean-Baptiste, avec le Dieu de tendresse et de bonté, le Prince de la Paix, la douce Lumière que nous annonce le temps de l’Avent? Dieu aurait-il deux visages, serait-il un Dieu imprévisible et changeant? Certainement pas. Si quelqu’un est bien fidèle et plein d’amour, c’est bien notre Dieu et notre Seigneur Jésus. L’Écriture ne nous révèle pas un Dieu ayant un double visage. Mais elle nous montre les diverses facettes d’un même amour qui se dévoile dans l’infinie diversité de nos existences humaines.

Vous le savez, vous les parents, peut-être les mères en particulier. Si vous avez de temps en temps, quelque parole un peu forte, si vous corrigez parfois avec un peu de rigueur vos enfants, ce n’est pas par manque d’amour, mais c’est parce que votre amour est plus grand que votre besoin d’être aimés. Vous savez que l’amour veut d’abord le bien de l’autre, avant de rechercher sont propre avantage. Certains événements de la vie, les passages difficiles, les épreuves nous font souffrir, c’est vrai. Nous pouvons en ressentir des malaises, même des ressentiments à l’égard de Dieu... Nous aurait-il abandonné? Aurait-il fermé ses entrailles de miséricorde? Certainement pas. Mais comme le dit le psaume, il nous est bon parfois d’être un peu secoués, pour découvrir que nous faisons fausse route, que nous risquions même de nous perdre. Dans sa tendresse, Dieu ne nous abandonne pas à nos caprices, à nos paresses. Il nous reprend, nous corrige, nous bouscule même, parce qu’il nous aime. Nous avons sans doute fait l’expérience de ces amours pleins de force et d’exigence, de bonté et de miséricorde, qui ne sont jamais fatigués de nous relever, de nous consoler quand nous étions dans la peine, de nous secouer quand nous risquions de sombrer dans le sommeil ou même dans l’oubli.

Jean-Baptiste, comme tous les prophètes de l’A.T., est le signe de cet amour infatigable de Dieu pour chacun de nous. Notre monde n’a-t-il pas besoin d’être aussi réveillé, secoué, lui qui glisse si facilement dans le matérialisme et l’indifférence. En nous rappelant, avec insistance, que Dieu nous aime de cet amour fort et bienveillant, l’Église nous redit à quel point nous sommes importants pour Lui, quelle valeur infinie nous avons à ses yeux. Il ne veut surtout pas nous perdre, perdre un seul de ces petits. Car il a donné sa vie pour nous. Son amour dépasse tout ce que nous pouvons imaginer.

Alors, même conscient de cela, ce n’est pas demain la veille “qu’il ne se fera plus rien de mauvais ni de corrompu” dans nos sociétés. Nous ne pouvons ignorer la multiplicité, la diversité et la complexité des personnes et des situations actuelles. L’arrivé de la justice et de la paix entre tous les humains ne va pas de soi. Mais si, personnellement, nous acceptons de nous laisser changer, transformer, le monde peu à peu changera. L’Avent est un temps d’arrêt dans le bruit de notre vie pour nous permettre de prendre conscience du nécessaire changement de notre coeur. Personne ne peut le faire à notre place.

Bien sûr, la conversion n’est jamais accomplie une fois pour toutes. Nous pouvons manquer de confiance et nous décourager. Nous sommes des êtres fragiles, désireux de nous mettre en valeur ou de faire comme les autres pour ne pas nous attirer de critique. Mais il nous faut tenir bon “grâce à la persévérance et au courage que donne l’Écriture” comme dit s. Paul. Et la Parole nous affirme que Dieu garantit ses promesses. Reconnaissons que nous avons besoin de la grâce de celui qui vient vers nous. C’est elle qui nous incite, dès maintenant, à puiser dans les forces qui nous habitent et à ouvrir la route à celui qui vient. Ainsi, nous serons en mesure d’accueillir et de vivre pleinement la joie de Noël.

Donc, souvenons-nous que nous sommes en Avent. Ce temps nous renvoie aussi à l’avènement final du Christ. Y a-t-il un espace dans ma vie qui est ouvert à la venue du Christ ressuscité, terme l’histoire humaine et de la mienne. Est-ce que j’y pense de temps en temps? Sur les jeunes, et même sur les vieilles souches, peut surgir un rejeton plein de vie. Quel secteur de ma vie a grand besoin d’être régénéré? Dimanche prochain nous vivrons un temps de pardon et de réconciliation.

vendredi 12 novembre 2010

HOMÉLIE DU DIMANCHE 14 NOV 2010

L’ANNONCE DE LA FIN DU MONDE

Comme si tous les malheurs actuels ne suffisaient pas.... Comme si la crainte du réchauffement de la planète, les menaces terroristes, les désastres écologiques, la pollution, les inondations les rumeurs de guerre, etc... vous allez dire: pourquoi l’évangile vient en rajouter avec l’annonce de la fin du monde? Pour nous aujourd’hui, quel sens peuvent avoir ces lignes ce matin? Comment çela a pu avoir du sens pour les personnes de toutes les époques qui ont entendu ces paroles (car il y a toujours eu dans le passé des malheurs, en quelque part sur la planète.)

C’est plutôt un avertissement que nous fait Jésus. “Ne vous laissez pas égarer, car beaucoup viendront en mon nom... Ne marchez pas derrière eux!”. Cette mise en garde est toujours d’actualité: notre époque a vu apparaître toutes sortes de gourous qui abusent de la naïveté des gens. Des faux christs qui utilisent les catastrophes actuelles pour dominer et entraîner certaines personnes plus fragiles ou angoissées sur des chemins sans issue, sinon pour profiter de leur porte-monnaie. Depuis les années 60 c’est par centaines qu’on dénombre les groupes sectaires au Québec et parmi eux des spécialistes en prédiction de la fin des temps. “Ne vous laissez pas impressionner”, dit Jésus. Que penser de la prédiction de la fin du monde pour le 21 décembre 2012?

Comme les disciples émerveillés par la beauté du temple de Jérusalem (une des merveilles du monde à l’époque) nous admirons nous autres aussi les prouesses de la technique actuelle: la diffusion de l’internet, l’électronique miniaturisée, la conquête spatiale, les miracles des nouvelles méthodes de chirurgie, etc... et pourtant il y a des fragilités dans tout cela. La distance croissante entre les riches et les pauvres, les licenciements, les scandales financiers sont un danger pour l’équilibre social et mondial; quand la justice est bafouée, la paix est menacée. Nous sommes plus vulnérables qu’il paraît: une panne électrique générale, une inondation, un ouragan, un nouveau virus plus résistant et l’édifice est secoué. La menace terroriste fait trembler bien des pays. La perte des repères et des valeurs morales cause le désarroi de bien des personnes, dont des jeunes qui ne savent plus distinguer entre le bien et le mal, le virtuel et le réel. Dans nos vies bien des choses peuvent basculer du jour au lendemain. La vie est si fragile... on le chante à la radio!

L’Évangile nous invite donc de façon pressante à rechercher le roc solide de la foi et de la Parole de Dieu pour appuyer nos vies. Notre assurance vient du Seigneur. C’est par votre persévérance, votre constance que vous obtiendrez la vie. “N’ayez pas peur”.. c’est aussi la parole prophétique de Jean-Paul II au tout début de son pontificat. Elle rejoignait celle de Jésus à ses disciples avant son grand départ. Il s’agit entre-temps de rendre témoignage sereinement, positivement de ses convictions, même si elles causes des rires ou des moqueries. “Tu crois encore à ça, toi!” Dans ces moments-là ne vous préoccupez pas trop de trouver les mots, il vous sera donné un langage de sagesse qui vous surprendra vous-mêmes. Ça vous est peut-être déjà arrivé. “.Ne craignez pas, relevez la tête, votre délivrance est proche” dit Jésus!

Le témoignage le plus convaincant n’est pas celui des discours éloquents, mais celui des actes. C’est le sérieux apporté à nos tâches quotidiennes, une certaine détente et une joie de vivre, la confiance en l’avenir, qui parlent le plus fort. S. Paul reprochait justement à de jeunes communautés de s’être laissées démoraliser à cause d’une attente mal comprise du retour du Seigneur.

La destruction du temple qui est arrivée effectivement dans les années 70 n’a rien changé dans l’attitude de Dieu à l’égard de ses enfants. Il est resté fidèle à son alliance. Même, il a édifié désormais un nouveau temple, c’est le grand Corps de Jésus ressuscité dont nous sommes les cellules, les pierres vivantes. Jésus nous appelle donc à la paix intérieure, à la sérénité! Pas un cheveu de votre tête ne sera perdu: consolant pour ceux qui en ont moins...

L’Eucharistie nous aide à tenir bon dans nos convictions. Elle fait grandir notre union avec le Seigneur et entre nous. Elle nous aide à devenir des signes de sa présence au milieu d’un monde inquiet. Elle contribue à construire le nouveau Temple spirituel où Dieu est adoré en esprit et en vérité.... c’est l’Église, la communauté que nous formons. Par ailleurs, avouons-le, une Église elle aussi fortement secouée....

En fait, nous assistons plutôt à la fin d’un monde, d’une époque: aussi, à la fin d’une manière de faire Église. A nous de travailler à faire venir le Jour du Seigneur, d’inventer une nouvelle manière de vivre en paroisse, dans des regroupements dont on n’a pas le choix mais qu’il faut inventer. Tout en nous engageant pour plus de justice, pour contrer les préjugés, en dénonçant les combats d’arrière garde. Rappelons-nous les paroles de Jésus: “Je vous inspirerai moi-même un langage et une sagesse à laquelle tous vos adversaires ne pourront opposer ni résistance, ni contradiction,... C’est par votre persévérance que vous obtiendrez la vie...”

mercredi 3 novembre 2010

HOMÉLIE DU DIMANCHE 7 NOV 2010

LA VIE APRES LA MORT

Le mois de novembre nous offre l’occasion de réfléchir un peu plus sur la mort. On a beau chasser de notre esprit cette perspective obligée, elle est toujours là. Accident, suicide, cancer, etc. Dans une même famille l’un meurt à trente ans, l’autre à 90 ans; celui qu’on considérait comme un bon gars meurt jeune, l’autre qui a une vie déréglée semble immortel. On dit: c’est pas juste. Le vieillard malade depuis longtemps dira: le bon Dieu m’a oublié!

Autrefois la mort était marquée par la crainte du jugement, la peur de l’enfer. Les rites funéraires étaient austère, tragiques. “Dies irae, dies illa” chantions-nous, “jour de colère que celui-là!” L’église des funérailles était tapissée en noir de même que les vêtements liturgiques. Aujourd’hui c’est le contraire. On dit plutôt: la personne est partie pour un monde meilleur. On a tendance à atténuer l’idée du deuil, de la rupture. On célèbre davantage la vie de la personne défunte. Au salon, on va projeter des photos qui la montrent lors d’un repas, jouant au golf ou avec ses petits enfants.

Autrefois on cultivait beaucoup la mémoire: un long temps de deuil, messes anniversaires, visites nombreuses au cimetière. Maintenant il arrive qu’on veuille faire vite, comme pour chasser un mauvais souvenir: quelques heures au salon ou à l’église, corps non exposé, incinération. On ne célèbre plus la mort, on l’expédie. Une enquête tend à révéler qu’une personne sur trois décédée au Québec ne ferait l’objet d’aucun rite formel de funérailles. Beaucoup de cendres ne sont jamais réclamées par les proches du défunt ou encore dispersées au vent dans un coin de nature; ce qui indique l’indifférence des vivants à l’égard de leurs morts ou du moins l’inconfort d’y penser. Et il nous reste quand même une question brûlante, lourde de sens, autrement profonde, sur la signification de l’existence humaine: y a-t-il une vie après la mort?

Il est difficile de nous représenter une vie après la vie sans puiser dans les réalités de la vie actuelle. On rêve de paysages luxuriants, à des îles enchantées, à des parties de chasse ou de pêche fabuleuses. Chacun s’invente un ciel selon ses pulsions ou ses désirs. Les musulmans parlent d’un jardin de délice avec de jeunes vierges... Ou encore, quelqu’un qui croyait à la réincarnation disait: je vais pouvoir revenir pour utiliser les nouveaux gadgets toujours plus performants qu’on voit dans les films de science-fiction, les voyages dans l’espace... l’autre plus prosaïque disait: je vais pouvoir retourner chez McDonald!

Quel lien avec l’Évangile d’aujourd’hui? Justement, des gens qui ne croyaient pas à la résurrection, les sadducéens, imaginaient celle-ci comme une copie de la vie présente. La loi de Moïse obligeait un jeune frère à épouser la veuve de l’aîné, si celui-ci était mort sans laisser d’enfant. Engendrer un enfant, pour les juifs, c’était comme prolonger son existence. Mourir sans enfant c’était comme disparaître définitivement. Alors on tentait de ridiculiser Jésus avec ce cas où sept frères auraient épousé la même veuve... on imagine quelle belle chicane une fois rendus au ciel.... Jésus leur dit: quand je vous parle de résurrection, vous n’avez rien compris. La résurrection des corps ça ne veut pas dire la réanimation d’un cadavre une fois rendu dans l’au-delà ou à la fin des temps. C’est l’accomplissement de toute la personne, corps et âme, esprit et mémoire, dans une vie transformée. Il faut parler de toute la personne vivant dans la lumière et la paix de Dieu. Quand on parle de corps dans la langue de Jésus on désigne toute la personne et non le soutien matériel seul, physique, qui se détruit.

On risque dans la pensée courante d’imaginer l’autre monde comme une amélioration du monde présent: plus de santé, plus de confort, plus de plaisirs, plus de musique, etc... mais l’expérience sérieuse de notre vécu devrait nous conduire vers d’autres horizons. Qu’est-ce qui est essentiel dans la vie: est-ce posséder une maison, une grosse voiture, ramasser de l’argent? Toutes sortes de choses qu’il faut quitter un jour: la maison vers un appart ou le CHLD, la voiture pour la marchette, le compte de banque pour le testament. Ce qui reste vraiment ce sont les relations que nous avons tissées: les amitiés, les amours, la tendresse donnée, les pardons accordés, l’espérance semée et les joies partagées. Il faut une vie pour apprendre cette leçon, pour passer de l’environnement des choses matérielles à la transparence de l’amour, de l’accueil, de la bonté. C’est de ces réalités que l’au-delà est fait. Ce sont elles seules qu’on apporte avec nous, celles qui ont modelé notre vraie personnalité et qui survivent dans la résurrection. En somme, il faut traverser la vie pour finalement rencontrer Dieu. Celui que Jésus appelle “Père”, le Dieu des vivants.

La résurrection, c’est vivre en Dieu, comme une planète autour du soleil, entrer dans son attraction, y trouver la plénitude, toute notre personne étant transformée. Il n’y a pas de mots pour dire cela. Des fois, une perception ou une expérience peut en donner un petit aperçu, un flash, comme dans un grand amour, devant un coucher de soleil, la beauté d’une fleur ou d’une mélodie. Certains grands musiciens ont créé des œuvres qui nous amènent près de l’éternité. Dans la foi, on peut saisir alors que la vie éternelle est déjà commencée, car en Dieu, même fragiles et mortels, nous recevons des bribes de cette vie. Nous sommes filles et fils du Père, héritiers de la résurrection. C’est normal qu’on reçoive de petits avant-goûts de notre héritage. Gardons l’oeil ouvert et surtout donnons plus de place dans nos vies à la Parole de Dieu qui, sans le décrire, nous dit des choses importantes sur l’au-delà.

vendredi 22 octobre 2010

HOMÉLIE DU DIMANCHE 17 oct 2010

Le 17 octobre 2010, Canonisation du saint Frère André

Quand on contemple l’Oratoire Saint-Joseph, au sommet du Mont-Royal, et son dôme qui se découpe dans le ciel, on est impressionné par le caractère grandiose d’une telle réalisation. Et ensuite, quand on évoque en contraste le profil du personnage du frère André à qui revient la paternité de cet édifice, le plus grand sanctuaire au monde dédié à Saint-Joseph, on est forcé d’admettre qu’il existe des oeuvres de grande envergure qui relèvent d’une intelligence bien différente de la logique marchande des méga-promoteurs de ce monde. Pensons au projet du maire Labaume, au toit du stade olympique, aux subventions souvent requises de nos gouvernements. Rien de tel de la part du Frère André. Même, l’Évêché de Montréal était réticente à l’idée d’investir là-dedans.

Alfred Bessette, un Québécois pure laine, est né à Saint-Grégoire d’Iberville; il est devenu celui que nous nommons le Frère André en 1870. Il est canonisé aujourd’hui à Rome. Belle coïncidence, car ce 17 octobre c’est aussi la Journée mondiale du refus de la misère. Pour avoir plongé dans la foi, il a obtenu la médaille d’or: c’est la consécration de la réussite d’une vie.

De santé fragile et assez petit physiquement, mesurant à peine 5 pieds, orphelin de père à 9 ans et de mère à 12 ans, il se retrouve sur le marché du travail à 15 ans, sans trop de préparation au niveau scolaire. Il occupe des emplois assez humbles: garçon de ferme, journalier, manoeuvre, apprenti; le futur bâtisseur de cathédrale ne possède certainement pas l’allure d’un gagnant. Pendant une dizaine d’années il exerce une série de petits boulots dans sa région. Puis comme beaucoup de ses concitoyens il émigre aux USA où il travaille dans les “factries”, les filatures. Il incarne le profil socio-économique de beaucoup de canadiens-français de cette époque.

Il est de tempérament sociable, réaliste et faisant tous les efforts pour assurer sa subsistance; il vit quand même avec le sentiment qu’il n’était pas fait pour ce genre de travail. Dès l’enfance, on le retrouvait souvent en prière. Les gamins du village l’appelle le “fou de Saint-Joseph”. Il prend enfin la décision d’entrer dans la congrégation de Sainte-Croix. Le curé de sa paroisse qui va le recommander, écrivait à la communauté: “Je vous envoie un saint”. En voilà un qui voyait clair! Quasi illettré, il finit par être accepté. Il occupera toute sa vie la tâche de portier du collège. Il dira: “ils m’ont accueilli mais il m’ont mis à la porte et j’y suis resté toute ma vie!” C’est là qu’il reçoit les pauvres, les quêteux, les malades. Il prie pour eux, cherche à les relever à la manière de Jésus. Il les invite aussi à faire leur part, à y mettre du leur... d’où sa réputation d’être un peu exigeant, un peu grognon. Mais c’est là que commencent les miracles, à son corps défendant. “Ce n’est pas moi, c’est saint Joseph qui fait ça!” Il sera vite reconnu comme un thaumaturge, à qui des milliers de guérisons inexplicables seront attribuées. Il n’avait pas d’autres stratégies d’intervention que la prière et la dévotion à saint Joseph. Ça pouvait prendre la forme symbolique de médailles ou de petits flacons d’huile. Mais il est lucide sur l’efficacité de tout cela; ce sont d’humbles moyens qui deviennent des expressions de foi. “Il faut de la foi pour se frictionner avec de l’huile de saint Joseph”. De sa part, il prie très tard dans la nuit. A un confrère qui l’entendant prier durant la nuit, lui suggère plutôt de dormir à cette heure, il réplique: “Si vous saviez dans quel état sont les gens qui se recommandent à moi, vous ne me demanderiez pas ça!” Il avait la conviction absolue que le bon Dieu s’occupe des petits et des pauvres, qu’il n’abandonne personne, qu’on peut tout demander à saint Joseph et que celui-ci peut tout obtenir de Jésus... “on ne refuse rien à son père!” Il n’y a pas d’autres secrets d’entreprise que celui-là, pour rendre compte des miracles du frère André. Sans parler des constructions qui vont bientôt commencer à s’édifier.

Dans le Québec pauvre et misérable de son époque auquel il s’était profondément identifié, il a contribué à aider les siens à garder espoir. La preuve, c’est un million de personnes, le tiers de la population du Québec d’alors, qui vont gravir le Mont-Royal pour défiler devant sa dépouille à sa mort en janvier 1937. Les gens l’avaient déjà canonisé dans leurs coeurs.

Aujourd’hui encore sa canonisation par Rome peut nous redonner un peu d’espoir. Au moment où la mondialisation transforme la planète en un immense marché, où les riches deviennent plus riches et les pauvres sont plus vulnérables et plus pauvres, l’histoire de sa vie nous signale qu’il y a une autre logique que celle de l’argent et du profit, qu’un autre monde est possible, celui du partage et de la gratuité.

Pour lui pas de spéculations financières; son oeuvre s’édifie sur la foi, l’écoute des besoins des pauvres et la mobilisation des fidèles. L’Oratoire va s’élever lentement par étapes successives, de simple abri en chapelle, de chapelle en église, puis en une immense basilique. Tout cela à l’aide de sous récoltés progressivement, en partie chez les pauvres.

La canonisation du Frère André nous fait entrevoir qu’il existe encore aujourd’hui des bâtisseurs et des bâtisseuses qui refusent la misère, qui sont animés par la foi et l’espérance, aussi par la certitude de vaincre. Le fondateur du mouvement ATD Quart-Monde disait: S’unir pour faire respecter les droits des personnes est un devoir sacré”. Le 17 octobre 2010 sera vraiment une date lumineuse sur la terre comme au ciel. Vive le Frère André, vive toutes formes de lutte contre la pauvreté! Aussi bon succès à la marche des femmes contre la misère!

lundi 11 octobre 2010

HOMÉLIE DU DIMANCHE 10 oct 2010

DIRE MERCI

Chaque année, le 2e lundi d’octobre, c’est la fête civile de l’Action de grâce. Après les couleurs de l’automne, le temps des récoltes est à peu près terminé. La nature a été encore une fois très généreuse en variétés et en saveurs. Nous sommes invités à laisser monter vers Dieu un grand merci pour tous les fruits de la terre et tout ce que nous recevons de la vie. Dire merci n’est pas aussi naturel qu’on le pense. Nous avons appris tout jeunes à dire merci. C’est une affaire d’expérience et d’éducation. Pensons à cette question que les parents adressent si souvent à leurs enfants: “Qu’est-ce qu’on dit?”

Il y a des mercis polis sans plus, des mercis de convenance, des mercis empressés et sincères. Ils n’ont pas tous la même valeur. Il y a des mercis du bout des lèvres, d’autres qui nous tournent vers le prochain pour lui exprimer sincèrement notre appréciation. Dire merci est à la fois de la gratitude pour le don reçu et de la reconnaissance envers la personne qui donne. Voyons quelques exemples dans les lectures de ce dimanche.

La première lecture nous présente Naaman, un général syrien qui était lépreux. Un étranger et un païen en plus. Après avoir accompli, non sans quelques réticences, ce que lui demandait le prophète Élisée et constaté que la lèpre l’a quitté, il exprime sa reconnaissance envers celui qui est à l’origine de sa guérison. Pour lui, dire merci ce n’est pas seulement une politesse. Il remercie, mais il reconnaît que le don qu’il a reçu vient de Dieu. Sa reconnaissance est en même temps un acte de foi. “Je le sais désormais: il n’y a pas d’autre Dieu sur toute la terre que celui d’Israël” C’est pourquoi dorénavant, la terre d’Israël sera pour lui un lieu sacré.

Dans la lecture de l’Évangile, dix lépreux viennent à la rencontre de Jésus. Parmi eux, un Samaritain, un étranger. Encore là, Dieu n’écarte personne. Mais comme le prescrivait la loi juive, les dix malades se tiennent à distance, pas le droit de les approcher, car la lèpre les exclue de la communauté, faisant d’eux littéralement des hommes morts. Le Samaritain est doublement exclu car, en plus, il est vu comme un sectaire, un marginal face à la religion officielle. Cependant, alors que tous sont guéris, lui seul revient sur ses pas “en glorifiant Dieu à pleine voix”. L’évangéliste ajoute: “Il se jeta la face contre terre aux pieds de Jésus en lui rendant grâce”. Il remercie parce que sa prière a été exaucée mais il réalise surtout que Dieu a été présent et qu’il a agi en sa faveur par le Christ Jésus. Non seulement il voit celui qui l’a guéri, mais il reconnaît en lui son Sauveur. Il a obtenu la guérison du corps, il a été purifié de tout ce qui faisait de lui un exclu, mais, plus important, il a été guéri au plus profond de son coeur. La guérison du lépreux est un signe de notre propre guérison dans le Christ. Quand il revient sur ses pas, il n’exprime pas seulement de la gratitude, mais il reconnaît au nom de tous les croyants, l’amour de Dieu manifesté dans le Christ. Son action de grâce, comme celle de Naaman, est un acte de foi. Si les neuf autres ont été guéris, ce qui fait le bonheur du Samaritain, c’est la joie d’avoir rencontré son Sauveur. Alors Jésus peut lui dire: “Relève-toi et va; ta foi t’a sauvé!”... Tu es un homme neuf!.

Nous sommes rassemblés encore une fois pour célébrer l’Eucharistie. Nous pouvons assurément remercier Dieu pour les fruits de la terre et tout ce que nous recevons de sa bonté. Pour nous cependant, le premier motif d’action de grâce c’est avant tout l’amour de Dieu manifesté dans le Christ. En effet, quand nous célébrons la messe, nous rendons grâce à Dieu qui agit dans le Christ et par son Esprit dans nos vies. L’Eucharistie c’est un sacrement, celui de notre salut accompli par Jésus sur la croix. C’est aussi un sacrifice de louange, d’action de grâce pour l’oeuvre de la création. Toute la création qui est comme résumée dans le pain et le vin (le pain c’est en condensé la semence, la récolte, la transformation de la farine et la boulangerie... le vin c’est la culture du raisin, la vendange, le travail du pressoir, la fermentation, etc...) En somme ce sont les bienfaits de la nature qui se joignent au travail humain qui sont présentés au Père à travers la mort et la résurrection du Christ. En Lui la création est comme transformée et amenée avec Lui dans sa Résurrection. Par lui, l’Église peut donc offrir un acte de louange et de remerciement pour tout ce que Dieu a fait de beau, de bon et de juste dans sa création et dans toute l’humanité. Tout ce qu’Il nous réserve lorsque paraîtront les cieux nouveaux et la terre nouvelle, nous est annoncé.

Comme l’apôtre Paul, nous nous souvenons de “Jésus-Christ, ressuscité d’entre les morts.
Il est notre salut, notre gloire éternelle”. C’est pourquoi, malgré les épreuves et les difficultés de la vie, nous comptons sur son amour. Comme nous le chantons si bien: “Si nous sommes morts avec Lui, avec Lui nous vivrons. Si nous supportons l’épreuve, avec Lui nous règnerons!” Il est notre assurance! Et tout est gratuit. Donc mille mercis.

vendredi 1 octobre 2010

HOMÉLIE DU DIMANCHE 26 sept 2010

RÉFLÉCHIR ET METTRE LES PENDULES Á L’HEURE

Les milieux politiques et sociaux prennent de plus en plus conscience de la cassure entre les riches et les pauvres, à l’échelle de la planète, mais aussi dans nos propres milieux. La parabole de ce dimanche veut nous y faire réfléchir et mettre les pendules à l’heure si possible.

Le récit de Jésus met en scène deux hommes situés aux deux extrémités de l’échelle sociale de son époque. Il y a un super-riche gavé de bonne nourriture qui porte des vêtements de luxe et à sa porte, un pauvre hère qui se meurt dans un état de délabrement total. Il n’est pas dit que le riche soit un mauvais homme, il ne maltraite pas le pauvre, il ne le chasse pas, mais il l’ignore carrément, aveugle à sa situation.

Est-ce que ça ne ressemble pas au contraste que nous constatons actuellement? Sur la planète une population à l’aise, avec des dépenses parfois luxueuses, et tout près, vus par l’intermédiaire des médias, des millions de gens qui meurent de la faim, du sida ou de la violence guerrière. Qu’on pense à Haïti qui en plus, a subi un tremblement de terre, qu’on pense au Pakistan avec plusieurs millions de personnes déplacées, d’autres pays où l’on s’entend pour parler de nouveaux génocides. On est devant un monde brisé en deux.

Alors que le riche de la parabole semble indifférent, insensible, imperméable à la misère de Lazare, parce qu’il ne la voit pas... nous on ne peut pas l’être, à moins de fermer les yeux. Il m’arrive des fois à la télé de changer de poste parce que ce que j’y vois est intolérable, v.g. la souffrance des petits enfants africains qui meurent de faim. On pourra dire que le monde est bien mal fait... la faute n’en revient pas au Seigneur. Ce monde a été créé avec des ressources considérables, suffisantes, pour que les humains y vivent en frères et soeurs , en se partageant les richesses et les biens naturels. Mais la tendance à accumuler, à garder égoïstement pour soi est inscrite dans la nature, à moins qu’on en prenne conscience et qu’on la corrige avec la grâce et la lumière de Dieu.

Cette parabole nous avertit des dangers de la richesse qui peuvent refermer une personne sur elle-même et la porter à détourner son regard des autres. Le riche de la parabole n’a plus le temps de se décentrer de son bien-être et de voir le pauvre à sa porte. Il ne lui fait pas de mal, il l’ignore. C’est l’abbé Pierre qui disait: “il serait bon qu’on ait une petite fenêtre cassée en hiver quelque part au sous-sol ou dans son garage, pour qu’on sente le froid qui fait grelotter le pauvre ou qu’on entende son appel à l’aide!” Un passage frappant de la parabole c’est l’abîme que le riche constate après sa mort entre lui et la patrie d’Abraham où le pauvre a été recueilli. On pourrait croire qu’il y a là un châtiment, la conséquence d’une punition de Dieu. En réalité le fossé entre le riche et le pauvre avait été creusé bien avant, sur la terre; dans l’au-delà il devient un abîme qu’on ne peut plus franchir. Jésus avait dit d’ailleurs: “Tout ce que vous n’avez pas fait au plus petit d’entre les miens, c’est à Moi que vous ne l’avez pas fait.” Le riche n’a pas été seulement dur de coeur, mais un peu myope et assez dur d’oreille.

On notera que Jésus nomme le pauvre homme du nom de Lazare, ce qui veut dire en hébreu “Dieu aide”.... Dieu relève le pauvre, il lui viendra en aide un jour. Il n’a aucun appui sur le présent, il est tout entier tourné vers Dieu et son Royaume de justice. Voilà la grâce qui l’habite. Si Dieu ne l’exauce pas tout de suite, c’est peut-être pour qu’il soit une question, un signal, une interrogation qui pourrait secouer le riche et peut-être le sauver. Il lui rend service en quelque sorte en lui permettant de sortir de sa torpeur et de partager un peu de ses biens. C’est en ce sens qu’on parle souvent dans les évangiles des situations inversées: Dieu élève les humbles et renvoie les riches les mains vides...

Le riche finalement plaide pour ses frères qui sont encore vivants; il demande à Abraham de leur envoyer une sorte de fantôme, une apparition spectaculaire qui pourrait leur faire peur! Celui-ci lui répond: ils ont Moïse et les prophètes... qu’ils les écoutent. Ils ont aussi des pauvres qui leur tendent la main. En somme, la foi est une décision personnelle qui ne peut être provoquée de façon magique ou par la peur.

On pourrait se dire face à ces propos: nous on n’est pas immensément riches, on n’a pas ces grandes fortunes. Ces richesses qui me ferment les yeux ce serait plutôt tout ce qui m’accapare et aveugle mon coeur, ce qui m’empêche de porter attention aux autres, de partager avec eux mon amitié, mon temps, mon écoute et même parfois mon pain. Félicitons-nous des gestes de partage que nous posons par ailleurs. Il y en a heureusement! Par exemple, notre projet Brompton-Haïti.

La conclusion de cette parabole est la même que celle de dimanche dernier. Jésus nous dit: au lieu de faire de l’argent le socle ou la base de son existence pour finalement être déçu, qu’on s’en serve donc comme un instrument de partage, de communion, qu’il devienne l’expression de notre souci des plus faibles. Mgr Blanchet, ancien évêque de Gaspé écrivait déjà: “.... les siècles futurs ne jugeront pas notre début du 21e siècle sur son matérialisme, sur sa permissivité sexuelle ou sur les difficultés du couple ou de la famille...mais sur le fait qu’à des milliers d’exemplaires Lazare est mort de faim à notre porte, tout près de nos tables bien garnies...” Les personnes qui ont eu déjà l’occasion de vivre quelques jours en Haïti... en retiennent une expérience qu’elles n’oublient pas; pour ma part je la souhaite à qui voudrait bien la tenter...

Demandons au Seigneur ce (matin) d’ouvrir nos yeux et nos oreilles afin de percevoir sur la planète ou plus près de nous la situation ou la voix de celui/celle qui vit dans la détresse. Ouvre mon coeur Seigneur!

vendredi 10 septembre 2010

HOMÉLIE DU DIMANCHE LE 12 SEPTEMBRE 2010

LE VISAGE DE DIEU

L’Évangile nous manifeste un visage de Dieu avec lequel nous ne sommes pas encore trop familiers, tellement il va à l’encontre de nos peurs, de nos sentiments spontanés à son égard. C’est la joie de Dieu, un visage rayonnant du bonheur de retrouver et d’accueillir ce qui était perdu. Visage de Dieu étonnant qui rompt avec celui du juge impitoyable dont nous l’avons si souvent affublé ou masqué. Un Dieu-gendarme, un Dieu qui se venge ou encore qui permet à des kamikazes de faire sauter des bombes contre ses ennemis. Notre Dieu est tout autre...

Ce visage c’est Jésus évidemment qui nous l’a dévoilé à travers son propre comportement à lui; on n’aurait pas trouvé ça tout seuls. Jésus accueillait les publicains et les pécheurs; on dirait aujourd’hui la populace. Ces gens-là venaient à Jésus pour l’écouter. Ils avaient deviné les sentiments qui remplissaient son cœur, ils se sentaient reconnus, aimés malgré leurs péchés, malgré le mépris dont les enveloppaient les bien pensants de l’époque, ceux qu’on nomme les pharisiens. Ils retrouvaient près du Seigneur un sens à leur vie. Cette joie aussi débordait du cœur de Jésus; il la partageait en mangeant avec eux, en s’invitant même à l’occasion chez eux, comme chez Zachée. “Cet homme fait bon accueil aux pécheurs et il mange avec eux”.

Mais les autorités, du haut de leur fidélité à la Loi, récriminaient; ils n’admettaient pas qu’un honnête homme fréquente ces gens-là. Par un série de paraboles successives Jésus leur décrit (et nous décrit) la véritable attitude de Dieu, son ardeur à rechercher le pécheur, sa joie lorsque celui-ci revient, joie qu’il veut partager avec toutes ses créatures. Regardons d’un peu plus près ces paraboles.

Abandonner un troupeau dans le désert, lieu de tous les dangers, pour partir à la recherche d’une seule brebis perdue, ça défie notre logique. Le contraste que met Jésus entre les 99 brebis restées au pâturage et une seule fugueuse, ça accentue encore le prix que Dieu attache au salut de chaque être humain. Sommes-nous conscients de cette attitude de Dieu envers nous? Avons-nous nous-mêmes ce souci de rejoindre et de sauver ce qui se perd? Regardons dans nos milieux. Ça devrait influencer nos priorités pastorales et notre cheminement personnel de foi. La brebis perdue peut aussi représenter une part de nous-mêmes. N’avons-nous pas à l’occasion une part d’égarement dans nos vies? Sommes-nous conscients de la joie de Dieu quand nous revenons vers Lui? Son visage alors n’est pas celui d’un juge impatient mais celui d’un Père aimant.

Au redépart d’une année pastorale, c’est bon de s’en souvenir!

Regardons de nouveau le berger sur les traces de sa brebis manquante; on l’imagine scrutant les buissons ou chaque ravin ou amas de rochers. Regardons aussi la femme qui met la maison sans dessus dessous à la recherche de la pièce de monnaie égarée. On dirait aujourd’hui le billet de loto gagnant qu’on a mis on ne sait plus où... L’Évangile note finement qu’ils cherchent jusqu’à ce qu’ils retrouvent... rien ne peut décourager leur volonté de recouvrer à tout prix ce qui leur était si cher. Si la femme a retrouvé sa pièce d’argent et le berger sa brebis, c’est en raison de leur initiative et de leur détermination. Le Seigneur ne se décourage pas de nos insouciances, de nos abandons, de nos lenteurs, de nos surdités à ses appels. En retour, nous ne devrions pas briser le dialogue avec des personnes en révolte ou en rupture avec l’Église, que ce soit des jeunes rebelles ou dans le monde des adultes. Plutôt que de couper les ponts, demeurer ouverts, continuer la recherche. En somme emboîter le pas à notre Dieu en quête de ses enfants égarés. Faire tout pour lui procurer la joie des retours...

La dernière parabole, nous ne l’avons pas lue car nous la connaissons bien; c’est d’ailleurs la plus célèbre des Évangiles, c’est celle du Père prodigue. Jésus va plus loin en nous montrant que Dieu est un Père qui a des entrailles de mère, un excès d’amour pour ceux/celles qui se sont éloignés de Lui.. Le père donne l’ordre de rétablir son fils rebelle dans sa dignité première; il ne sera pas un serviteur ou un simple ouvrier dans son entreprise. Il est son enfant bien-aimé. Tout cela non à cause des mérites de celui qui revient mais à cause de la bonté ce celui qui l’accueille. Surtout que le fils qui est revenu ne l’a peut-être pas fait par amour pour son père mais, mêlé sans doute à un peu de repentir, par intérêt personnel.

Voilà le visage de notre Dieu dont Jésus a prouvé la vérité par toute sa conduite. Un Dieu qui pourrait punir, qui pourrait faire patienter, faire peser son désaccord envers ceux et celles qui ont vécu sans tenir compte de lui. Au contraire, c’est parmi les pécheurs que son Amour peut donner sa pleine mesure. Le seul obstacle que nous pourrions mettre, c’est de nous croire tellement du côté des justes que nous finissions par ne plus avoir besoin de son pardon.

Demandons au Seigneur de bien comprendre son message et de nous ouvrir sincèrement à Lui qui nous aime à ce point. Il a envoyé son Fils sur terre, au cœur de notre humanité, justement pour qu’il ramène, non à coup de bâton mais sur ses épaules chaque brebis perdue. Qu’il nous donne d’accueillir dans la confiance cette Bonne Nouvelle et la joie d’une telle tendresse.

Mettons cette nouvelle année sous l’enseigne de la bonté du Père. Rassemblés pour célébrer l’Eucharistie, prenons conscience que le Seigneur nous invite à entrer dans son amour, dans une communion profonde avec lui. Ainsi se développera en nous le goût de devenir les témoins de sa compassion et de sa joie autour de nous, à la maison, dans le quartier ou dans notre paroisse.

mardi 17 août 2010

HOMÉLIE DU DIMANCHE LE 8 AOUT 2010

Garder sa lampe allumée

Une grand’mère prenait une marche avec sa petite fille dans le cimetière paroissial, sous les beaux arbres. On s’arrêtait pour lire les inscriptions sur les épitaphes. C’était écrit: “A notre ange chéri... A mon époux regretté...Pour Jeannot, ta famille inconsolable... Pour notre Mamie que nous aimions tant... Par tes compagnons de chasse: Tu nous manques!” En sortant du cimetière, la petite fille demande: Dis donc Mamie, où est-ce qu’on les enterre les méchants?

Rendus à ce niveau-là on est sans doute tous bons! Mais la 2e lecture rappelle une évidence à laquelle nous ne prêtons pas suffisamment attention. Comme tous les êtres humains qui nous ont précédés, nous demeurons des étrangers et des voyageurs sur la terre. Viendra un jour où il nous faudra quitter notre coin de pays. On ne peut esquiver cette question même si un jour on pourra faire des éloges sur notre compte, il n’y a rien là pour nous enlevé de la liste.

Ceux et celles qui croient en Jésus, le Christ, adhèrent à ses promesses. Promesse d’une création nouvelle, d’une demeure où il n’y aura plus de pleurs, ni de cris, ni de tristesse. Promesse d’une vie nouvelle, éternelle et entièrement transformée. Si on croit vraiment à ces promesses, ça peut changer notre manière de vivre. Il se crée tranquillement dans nos cœurs comme une tension vers ce Royaume promis. On devient soucieux de se conformer aux consignes de Jésus: “Restez en tenue de service et gardez vos lampes allumées... comme des gens qui attendent leur maître à son retour des noces”.

Vivre en tenue de service c’est demeurer en attente de quelque chose de beau, de grand, de réjouissant et comblant que nous ne possédons pas encore pleinement: soit la paix profonde, la joie, la vie pleine, tous nos besoins comblés. C’est surtout vivre en attente de quelqu’un que nous connaissons et aimons déjà, Dieu qui est Père, Fils et Esprit, une nouvelle famille, que nous ne voyons pas de nos yeux et avec qui nous ne sommes pas encore en communion parfaite. Je suis toujours surpris quand les familles choisissent pour les funérailles d’un de leurs proches la chanson de Claude Dubois “Si Dieu existe...” et qui décrit comme les premiers instants vécus par le défunt après sa mort. Les premiers mots du refrain décrivent l’impression de l’âme qui prend son vol et qui constate: “Personne, personne...” Nous chrétiens on devrait chanter: “Quelqu’un, Quelqu’un”... Nous ne nous en allons pas vers le vide mais vers une présence aimante, Dieu qui nous accueille...

Garder sa lampe allumée, demeuré en tenue de service, c’est nous tenir prêts à accueillir une fois pour toutes le Dieu bon et miséricordieux en qui nous croyons. Nous espérons ainsi recevoir de lui tous les bienfaits annoncés et avoir le bonheur de le rencontrer dans une communion éternelle. Il y a aussi une hôtesse qui nous y introduira, celle à qui nous avons demandé mille fois d’être là maintenant et à l’heure de notre mort, la Vierge Marie.

Les lectures proclamées il y a quelques instants permettent d’être encore plus concret. Garder sa lampe allumée c’est aussi rester plus libre par rapport à ce qui nous attache sur la terre. Notre vieux Père Abraham demeure encore un modèle lui qui a laissé tous ses biens pour se rendre dans le pays que Dieu lui promettait. Il partait sans connaître le trajet qu’il allait parcourir. Jésus nous dit: “Faites-vous donc une bourse qui ne s’use pas, des placements qui ne fluctuent pas”. C’est aussi se tenir loin de tout ce qui défigure notre monde, de ce qui le déshumanise, comme la consommation effrénée, incontrôlée. On est littéralement englouti sous les gadgets qui sont supposés nous rendre la vie plus agréable. Ceci s’apparente au comportement du serviteur mauvais qui voyait que son maître tardait à venir et qui se mettait à boire et à s’empiffrer. Comme disaient les anciens païens: “Mangeons et buvons car demain nous mourrons”. On voit ça encore aujourd’hui!

L’attitude de service et de vigilance que recommande Jésus c’est, en plus d’être à l’affût d’un service à rendre, à l’écoute du besoin d’un proche, c’est de demeurer attaché à la volonté de Dieu comme Marie qui est le modèle de l’Église. Heureux les disciples qui tout en aimant vivre sur terre, n’oublient pas qu’ils sont des étrangers et des voyageurs. La vraie patrie se trouve ailleurs, où Dieu les appelle et les attend. Heureuses les personnes qui tout en jouissant des biens de la vie, de ses beautés et de ses petits bonheurs, ne s’en rendent jamais esclaves. Elles sont conscientes qu’elles devront les quitter pour renaître dans un monde meilleur. Ceux et celles également qui attendent non pas en se croisant les bras mais en essayant de construire un monde meilleur à l’image, quoique très imparfaite, de celui que Dieu remettra entre leurs mains.

mardi 29 juin 2010

HOMÉLIE DU DIMANCHE 27 juin 2010

“Qui suis-je” demande Jésus

“Qui suis-je” demande Jésus à ses amis. Cette question a rebondi constamment dans l’histoire du christianisme, chez nous comme ailleurs. Sans doute, ceux et celles qui l’ont posée n’ont jamais obtenu une réponse définitive! Il vaut la peine de la reformuler aujourd’hui, ne serait-ce que pour faire le point sur ce que nous croyons. Il faut admettre que le contexte social actuel ne favorise pas une réflexion sérieuse sur le contenu de notre foi. On vit à l’époque du doute, de la critique à tout niveau. Notre temps est marqué par le matérialisme et la sécularisation. On constate ici un vaste courant d’indifférence, de moquerie, sinon carrément de contestation de la foi catholique. Le judéo-christianisme est coupable de tous les maux, dit-on, style critique d’adolescents qui incriminent la maison familiale. C’est alimenté sans doute aussi par les médias, la littérature qui présentent Jésus tantôt comme un extraterrestre, comme l’époux de Marie-Madeleine ou comme une sorte de gourou formé en Inde, etc....

On ne nie pas les bienfaits du progrès social, des nombreux droits et libertés acquis, des découvertes technologiques, de la croissance à tout niveau. Mais on constate dans notre société bien des déceptions, des recherches de sens qui ne débouchent pas. Beaucoup d’espoirs et d’attentes naissent dans ce bouillonnement, mais est-ce que Celui que Pierre a désigné comme le Messie de Dieu y a encore sa place? Tout dépend évidemment de l’idée qu’on se fait de lui.
A la question “Qui suis-je?” plusieurs aujourd’hui répondraient: “je n’en ai aucune idée, je ne le connais pas, concrètement il n’a pas d’importance à mes yeux”. Même parmi les baptisés, certains en sont peut-être restés au petit Jésus de leur enfance; sont-ils intéressés à connaître vraiment le Christ adulte? Ils ne croient pas qu’il est la clé qui pourrait leur permettre de grandir, d’ouvrir leurs horizons, sortir de leurs routines. Y aurait-il chez nous des pratiquants non-croyants? C’est ce qui peut expliquer qu’on cherche à répondre à nos questionnements sur le sens de la vie, uniquement par nos propres moyens ou par ce que nous suggère les solutions commerciales, la consommation sans limite. Est-ce que l’abondance de ces biens arrive à combler notre faim de vivre à plein?
Mais il y a aussi ceux et celles qui croient et pour qui Jésus est quelqu’un d’important. On a fait sa rencontre lors d’une retraite, d’une lecture, d’un partage d’Évangile et on a réussi à lui dire: “Je crois Seigneur que tu es mon Sauveur personnel et que tu donnes sens à ma vie”. Nous faisons partie de cette catégorie, mais il nous arrive quand il s’agit de foi de demeurer perplexe, de n’avoir pas toutes les réponses. Avouons qu’il n’est pas facile d’être croyant/e à notre époque, encore moins d’exprimer sa foi avec des mots d’aujourd’hui.

Malgré tout, il vaut la peine de reconsidérer la question de Jésus:”Pour vous qui suis-je?” Comme l’apôtre Pierre, prenons le temps d’y répondre personnellement avec nos mots à nous. En affirmant qu’il est le Messie de Dieu, Pierre a vu juste, même s’il a du cheminer longtemps avant de comprendre la portée de sa réponse. Notre perception à nous pourra évoluer et elle changera dans la mesure où on le connaîtra de mieux en mieux.

Mais comment le connaître en profondeur? Peut-être faut-il commencer par mieux se connaître soi-même. La question pourrait v.g. se poser aux papas que nous fêtons aujourd’hui. “Qu’est-ce que je désire le plus: laisser le plus bel héritage à ma famille en terme de valeurs, de fidélité, de dévouement, d’amour. Où est-ce que je puis trouver la source et les aliments qui vont soutenir ces valeurs”. Un rapide coup d’oeil sur ce que le monde nous propose nous convaincra qu’au-delà de tout le bien-être matériel, qu’on ne boude pas, il y a un plus que nous puisons dans notre foi en un Dieu qui nous aime et que Jésus nous a appris à nommer du beau nom de Père. L’idéal pour répondre à cette question est de nous retrouver dans un climat de prière, tout comme Jésus lui-même l’était avant d’interroger ses disciples. Son identité à lui il la percevait à la lumière de sa relation avec son Père du ciel. Ce Père qui est fidèle et bon l’accompagnait tous les jours par son Esprit. C’était sa source! La prière qui se nourrit de la Parole révélée est sans doute la meilleure manière de découvrir qui est Jésus, le Fils du Père et de le rencontrer.

On aura remarqué le texte du psaume de ce dimanche. Au milieu des épreuves, dans une nuit profonde où le coeur est en situation de sécheresse, le psalmiste s’accroche à Dieu dans la foi pure, car il a déjà bénéficié de son secours. Quand on traverse une sorte de désert, dans l’incertitude et qu’ une foule de questions reste sans réponse, nous pouvons nous en remettre à Dieu dans la foi et l’espérance qu’il nous aidera à s’en sortir.

C’est peut-être la situation de nos pères qui n’est pas facile aujourd’hui. Ils n’ont plus la position traditionnelle où ils étaient responsables de transmettre les valeurs à leurs jeunes pour les guider dans la société, genre: “Nous autres on faisait ça de même!” Les modes de vie et de penser sont transmis depuis quelques décennies par les médias, l’internet, par le contexte social où il se forme des générations qui s’influencent entre elles et qui se modifient à tous les dix ans ou moins. Quel poids a la parole du père dans ce contexte?

Quoiqu’il en soit, il vaut la peine de dire à nos pères qu’ils demeurent importants à nos yeux et que c’est leur présence, leur patience, leur accueil, leur humour même qui nous rejoignent le plus. Comme dit le proverbe: “ce que tu es parle si fort que tu n’as pas besoin de dire quoi que ce soit!”

Prions pour nos pères, remercions Dieu de nous les avoir donnés. Que notre Père du ciel déverse dans leurs coeurs tout l’amour dont ils souhaitent entourer leur famille. Amen!

samedi 12 juin 2010

Homélie du dimanche de la Trinité 2010

J’ignore si quelqu’un a eu l’occasion d’observer de près un beau diamant. Cette pierre précieuse, même très petite, v.g. sur la bague de fiançailles de grand’ maman, même si on doit la regarder avec une loupe, on constate que sa brillance, sa forme et son éclat sont absolument merveilleux. Parfois de la grosseur d’un grain de sable, on serait tenté de mettre en doute sa valeur. Cependant c’est précieux, c’est toujours un diamant. Ça conserve sa valeur dans les familles, les héritages.

Il en va un peu de même de Dieu d’une certaine façon. La plupart du temps, sa présence se fait très discrète. Mais si nous nous donnons la peine de le contempler, nous découvrons en lui mille facettes. Sa grâce est infinie et les moyens de nous émerveiller sont inépuisables. Comme les nombreux côtés d’un diamant, le Père, le Fils et l’Esprit nous révèlent toutes les dimensions de l’amour de Dieu, ce que s. Paul appelait la longueur, la largeur et la profondeur de son souci pour nous. Ensemble, ils ne forment qu’un et pourtant chaque dimension de Dieu nous fait découvrir sa propre richesse, assez pour qu’on reconnaisse en chacun une personnalité distincte. Ils sont trois personnes en un Dieu unique: Dieu Créateur, Dieu Rédempteur, Dieu Sanctificateur! Ensemble ces personnes brillent d’un éclat incomparable et se reflètent l’une dans l’autre. Dans le Fils nous reconnaissons la générosité du Père (souvenons-nous que Jésus avait dit: “Qui me voit, voit le Père!”). Dans l’action de l’Esprit, nous constatons l’œuvre commune du Père et du Fils. Le Père a envoyé son Fils dans notre monde et Jésus finalement nous a envoyé son Esprit pour continuer sa mission.

Il y a une belle complicité entre eux. On peut constater qu’il y a beaucoup de joie quand on vit une bonne entente entre nous, avec une personne ou un groupe. Que ce soit avec des membres de la famille, avec des amis on son conjoint, la complicité permet une unité dans la pensée et dans l’action. On le constate souvent dans nos réunions; basée sur la confiance, on vit une communion profonde qui agrandit et facilite les effets des actions ou des projets qu’on entreprend. Toute tourne sur les roulettes! On peut imaginer ce qui peut se vivre en Dieu. Dans les lectures de ce dimanche, on devine la proximité qui existe depuis toujours entre les personnes de la Trinité. Le Père, le Fils et l’Esprit forment une équipe inséparable qui entreprend un défi extraordinaire, celui de faire entrer toute l’humanité dans sa communion d’amour, comme si son bonheur dépendait finalement de notre réponse. Comme le Fils est venu accomplir l’œuvre de salut du Père, l’Esprit est désormais et pour toujours à l’œuvre, en se faisant complice de Jésus-Christ, en répandant dans nos cœurs son amour. Il y a à un mystère étonnant et exaltant. De plus, la Trinité nous invite à vivre entre nous cette complicité. Nous devenons frères et sœurs en même temps que nous nous reconnaissons fils et filles bien-aimés d’un même Père.

Dieu ne se contente pas du bonheur exaltant qu’il vit à l’intérieur de lui-même, de son équipe, il veut le diffuser à l’extérieur. C’est la raison de la création du monde, une décision dictée par son amour. Il a mis un reflet de sa perfection dans chacune de ses créatures, un reflet de sa beauté, de sa bonté, de son ingéniosité. On remarque ça dans les plantes et les animaux. Mais comme la matière n’est pas parfaite ni infinie... il y a eu de la place pour des manques, des hasards malheureux.

Mais le reflet le plus accompli de Dieu c’est l’être humain fait à son image et ressemblance. Si nous vivons de la vie de la Trinité, nous parvenons à réussir notre vie. Si nous entrons dans la même ronde d’amour et d’échanges, si nous reconnaissons dans l’autre personne un bénéficiaire de l’intimité de Dieu, nous avons des chances de vivre un peu de leur complicité.

Elles ne sont pas nombreuses les traditions religieuses qui proclament un Dieu aussi près des humains. Un Dieu qui désire nous inviter à entrer dans sa ronde, dans ce dynamisme où l’amour est roi.
La première lecture soulignait de façon poétique les sentiments du Créateur dans l’œuvre de sa Sagesse: “Je trouvais mes délices jour après jour, jouant devant Dieu sur toute la terre, et trouvant mes délices avec les fils des hommes”. Dieu s’est plu à créer l’univers et l’être humain. Jésus s’est plu, malgré sa mort douloureuse, à donner sa vie pour que nous ne doutions jamais de son amour.

Sachons reconnaître l’originalité de la révélation du Dieu Père, Fils et Esprit-Saint. Si Jésus nous ne l’avait pas préciser,on ne l’aurait jamais trouvé par nous-mêmes. Mais le sachant, nous pouvons nous y reconnaître parce que nous sommes des êtres de relation, qui avons soif d’aimer et d’être aimés. Il y a plus de plaisir à donner qu’à recevoir, nous suggérait Jésus.

Le mystère de la Trinité est un mystère de vie, une manière de vivre. Nous croyons que nous existons vraiment quand nous nous distinguons, quand nous affirmons notre différence, notre individualité au détriment des autres. Dieu au contraire se définit non par ce qu’il retient, mais par le don qu’il fait de lui-même. Plutôt que l’individualisme qui ronge notre monde, qui détruit notre nature et notre culture, Jésus nous propose une autre manière d’être, un chemin de joie et de bonheur, qui passe par l’autre. Ne sommes-nous pas créés à l’image et à la ressemblance de ce Dieu qui est pleinement en se donnant, ce Dieu qui est Amour! Réussir sa vie c’est accepter de la donner aux autres! (Tout l’Évangile est résumé dans cette petite phrase!).

vendredi 21 mai 2010

HOMÉLIE DU DIMANCHE DE L’ ASCENSION 2010

HOMÉLIE DE L’ ASCENSION 2010

A la suite du décès d’un proche, il arrive souvent que nous prenions mieux conscience, après coup, de ses qualités et de tout ce qu’il a accompli. Quand l’effet de choc s’est atténué avec la fatigue des derniers moments, voici que son vrai visage nous apparaît plus clairement. Il fallait son départ définitif pour mieux le connaître et l’apprécier à sa juste mesure. “Ça c’était bien lui ou bien elle!”.

Il en a été de même avec l’Ascension de Jésus. Grâce à ce départ, les apôtres arrivent à mieux connaître le Christ et le Royaume qu’il a inauguré. Ils savent dorénavant qu’il est vraiment l’Envoyé de Dieu et même son Fils unique, puisqu’il est retourné chez Celui qui l’avait confié à notre monde, son Père. Durant son ministère, Jésus avait laissé entrevoir sa familiarité avec Dieu qu’il appelait Abba, mot qui correspond à « Papa ». En guérissant les malades, en chassant les démons, en proclamant une Loi nouvelle, il avait montré une autorité surprenant qui l’égalait à Dieu, au grand scandale des bien pensants. Avec l’Ascension, les disciples saisissent plus profondément le mystère de sa personne.

Même après Pâques, les disciples ne comprenaient pas clairement sa mission: “Seigneur, est-ce maintenant que tu vas rétablir la royauté en Israël?” s’étaient -ils empressés de lui demander. Ils rêvent toujours d’un royaume terrestre. L’ascension va les libérer de leurs fausses attentes. On serait porté nous aussi à souhaiter que Jésus revienne définitivement... des gens prédisent la fin du monde en 2013! Jésus au contraire nous laisse avec des responsabilités, des résistances à résoudre, des difficultés à affronter. Le Royaume qu’il a instauré est une réalité nouvelle qu’il nous revient de bâtir, faite de service, d’amour gratuit, de liberté et de communion ave Dieu. C’est ce royaume que nous sommes appelés à accueillir dans notre quotidien. L’ascension nous permet ainsi de mieux comprendre la personne et l’oeuvre de Jésus.

Il faut se rendre à l’évidence : nous ne pourrons jamais voir Jésus de nos yeux ni le toucher physiquement. Depuis sa résurrection, son humanité est totalement transformée. Il est devenu invisible, il est libéré de toutes les contraintes et limites du temps et de l’espace. Il n’est plus restreint à un pays, à un moment de l’histoire, à un petit groupe de disciples. La fête de l’Ascension nous apprend que Jésus peut habiter désormais le coeur des croyants/es par son Esprit. Il est le Sauveur de tous les humains. Il est contemporain de chacun et chacune de nous, de ceux et celles qui s’ouvrent à la foi.

Si Jésus s’est élevé, il y a là une image pour dire que c’est pour mieux rayonner, un peu comme une antenne de transmission qu’on place au sommet d’une montagne pour que sa puissance atteigne le plus de monde possible. Dégagé de l’espace et du temps, totalement en Dieu, Jésus est maintenant le coeur d’un monde nouveau et il est la lumière qui attire tous les humains. “Quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai tout à moi!”dit-il en s. Jean! La présence de Jésus ressuscité est invisible mais bien réelle, et encore plus intense et universelle que lorsqu’il côtoyait les gens de la Galilée.

S’éloigner pour que ceux qui, dépendant de nous, puissent prendre leur responsabilité. Tous les parents, un jour, consentent à prendre de la distance par rapport à leurs enfants pour qu’ils puissent tracer leur propre route, sinon faire leurs premiers pas. De la même manière, Jésus a quitté ce monde pour que nous puissions tracer nos pas vers Lui et les autres. Le Ressuscité nous donne de l’espace pour que nous nous tenions debout. Il tient à demeurer discret pour nous donner l’occasion de parler, de témoigner et de prendre des initiatives. C’est à la suite de son départ que finalement les premiers disciples se sont mis à parler de lui non seulement à Jérusalem mais dans toutes les grandes villes de l’Empire romain, le monde connu d’alors.

Le Seigneur nous confie la mission de rendre visible et concrète sa présence. C’est nous, dorénavant, qui lui donnons un visage qui attire, des mains pour secourir, des yeux pour voir les personnes qui sont dans le besoin, une voix pour proclamer l’Évangile, un coeur pour aimer... Nous avons de la difficulté peut-être, à imaginer qu’il nous fasse assez confiance en nous laissant une si grande responsabilité. Son départ est l’occasion pour nous de vivre de nouveaux commencements, de prendre des engagements d’adultes et de mettre toute notre créativité au service de la Bonne Nouvelle. C’est vrai, particulièrement, à notre époque où nous devons nous regrouper pour former des communautés paroissiales peut-être plus petites mais aussi, plus vivantes.

L’Eucharistie que nous vivons aujourd’hui nous unit de façon spéciale à lui qui est monté au ciel pour nous rendre participants un jour de cette vie qui est la sienne. Nous ne sommes pas laissés à nous-mêmes puisque le Seigneur Jésus est toujours avec nous par le don de son Esprit. Il nous soutient et nous communique l’audace d’être ses témoins, ici et maintenant. Dans le contexte actuel d’une baisse de la moralité publique et individuelle, notre monde a grandement besoin de ces témoins. Témoins de la vérité bien malmenée, de la justice peu respectée, de l’honnêteté partout bafouée. Le serons-nous?

jeudi 13 mai 2010

Homélie Fête des Mères

Deux chirurgiens échangeaient ensemble pendant que l’un d’eux tournait un globe terrestre placé sur son bureau. Il pointait les endroits où sévissaient la guerre, la torture, les nettoyages ethniques, la faim, le racisme. “Qu’est-ce que tu en penses cher collègue?” “C’est grave, pour la planète ça prendrait une greffe cardiaque et ça presse!” L’autre lui répond: “Il y a un donneur, on le connaît et il attend ça depuis 2000 ans”. Vous devinez qui! C’est celui qui nous a donné comme consigne: “Aimez-vous les uns les autres”. La parole la plus connue de Jésus non seulement auprès des chrétiens mais aussi des non-croyants. Cette prescription morale rallie la majorité des gens, peu importe leur religion, leur culture ou leur rang social. Mais justement Jésus n’a pas été le premier à la donner. De grands philosophes, des sages de toutes les époques l’ont livrée à leurs disciples. On pourrait en conclure en disant aux jeunes soumis au nouveau cours d’éthique+ culture religieuse: voyez Jésus a été un grand prophète mais il y en a eu d’autres aussi importants que lui.
Mais on oublie là quelque chose d’important, soit le reste de la phrase.... “Comme je vous ai aimés”. Un détail qui fait toute la différence. Où sont les prophètes ou les sages qui ont donné comme Jésus leur vie par amour. Les chrétiens disposent là d’un d’un point de repère unique pour parler d’amour et en vivre pleinement. Le véritable amour prend sa source en Dieu. Il nous arrive par Jésus et son Esprit-Saint. Nous avons médité au cours des semaines après Pâques sur la belle figure du Bon Pasteur qui donne sa vie pour ses brebis, qui se met à la recherche de celle qui est perdue. Aussi on a regardé la belle image de la Vigne qui accepte d’être blessée pour que sa sève circule dans le greffon. “Je suis la Vigne” dit Jésus....

Le Père aime le Fils et le Fils nous aime. Comme lui nous aime à ce point, aimons-nous les uns les autres. Cela n’est pas trop compliqué à comprendre, mais plus exigeant à vivre cependant. Cela suppose qu’on tourne souvent nos regards vers Jésus pour apprendre à aimer à sa manière. La source la plus profonde de la joie c’est de nous savoir aimés. Alors laissons-nous aimer par Dieu. Ça nous permet de mieux aimer à notre tour notre prochain et de vivre dans la joie du Père. Si je suis convaincu que mon voisin, ma voisine sont ainsi aimés de Dieu -ils sont ses enfants après tout- ça m’aide à les aimer à mon tour...

Les lectures de ces derniers dimanches nous ont présenté des attitudes concrètes à développer pour aimer à la manière de Dieu. Aujourd’hui, il est question de l’essentiel, de ce qui cimente le tout: demeurer dans son amour. Voici quelques caractéristiques de l’amour de Dieu que nous sommes invités à refléter de notre mieux:

-un amour gratuit qui est un don, qui n’exige pas de retour, qui prend sa source dans l’amour du Père qui est tout-à-fait désintéressé

-un amour sans condition et contagieux qui ouvre les portes à toutes et à tous sans distinction de langue, de race

-un amour sans limite qui se donne tout entier et sans compter, à la manière de Jésus

-un amour qui crée des liens de communion, qui porte des fruits de tolérance, de pardon

-un amour qui sera victorieux du mal, qui traversera les épreuves et qui est source de joie parfaite.

La veille de sa mort Jésus présente donc à ses amis le sommet de l’amour tel qu’il le vit avec le Père et toute l’humanité. Quelques heures avant de le concrétiser sur la croix, il révèle ce qui va se passer malgré les apparences d’un échec. Mais ce sommet de l’amour, il est difficile pour nous de le réaliser car nous ne sommes pas parfaits. Cette communion intime entre le Père et le Fils à laquelle nous participons depuis notre baptême, se réalisera lors de la venue définitive du Christ, quand il aura vaincu toutes les forces du mal. Pour l’instant nous avons à nous laisser aimer et faire effort pour mieux aimer à notre tour. Visons ce sommet en sachant que Dieu nous y conduit lentement au long de notre passage, de notre pèlerinage qui prendra fin dans son royaume.

En attendant, beaucoup de gens font des efforts pour mieux aimer. Il y a toutes sortes de thérapies offertes pour retrouver son équilibre, arriver à s’accepter soi-même et mieux accueillir les autres. Il y a la phytothérapie avec les inconditionnels des boutiques de produits bio qui connaissent toutes les vertus des plantes, du nectar d’abeilles. Il y a les tenants de l’aromathérapie, qui croient à l’influence des huiles essentielles, des parfums. D’autres vous conseillent la thalassothérapie ou les cures thermales, les spas, les massages (télé). Il serait trop long d’énumérer les multiples propositions de la psychothérapie; il y en a des centaines de techniques. On parle de la zoothérapie; on s’est rendu compte que la présence des animaux peut contribuer à détendre et soigner les humains, les vieillards, les enfants autistes. A chacun sa thérapie et sans contredit elles peuvent améliorer la vie. Mais il y en a une qui nous est commune, qui convient à tous, où tous peuvent être patients et soignants, c’est l’agapéthérapie. Agapè c’est le mot grec des évangiles pour désigner Dieu, c’est le nom de Dieu. Quand s. Jean dit que Dieu est amour c’est le mot qu’il emploie. Dieu est agapè: cela signifie don de soi, amour service, attention, amour délicatesse, tendresse gratuite, amour inconditionnel. Dans l’agapéthérapie depuis notre baptême et notre confirmation nous pouvons tous être médecins, de par la présence de l’Esprit-Saint dans nos cœurs.

Demandons-lui de nous le faire comprendre... Jésus a bien dit avant de nous quitter: “Lui vous enseignera toutes choses!” Tu aimes le monde et nous en témoignons nous dit le thème de ce dimanche.

dimanche 11 avril 2010

PAQUES 2010

PÂQUES 2010

En méditant sur la célébration de ce matin et sur les textes de la liturgie d’hier soir, une image qui me vient souvent s'est représentée à mon esprit. Il vous est peut-être arrivé lors d’un voyage de vous trouver très tôt dans une grande église ou dans une cathédrale, de bonne heure, quand le soleil n'est pas encore levé ou que le temps est nuageux. Vous vous êtes approchés des verrières qui vous ont semblé bien peu attirantes. Vous avez vu là des plaques de verre sombres, fades, entrecoupées de lisières de plomb, un métal terne et froid. Il n'y a rien là qui séduise l’oeil ou qui réjouisse le coeur. On tourne rapidement le dos en se disant: c'est moche, allons voir autres choses!

C'est un peu l'expérience de Marie-Madeleine et des femmes qui avaient suivi Jésus; elles s'étaient rendues à son tombeau pour compléter son embaumement le lendemain du sabbat. Il fait encore nuit, elles ne peuvent distinguer que de la grisaille, ce qui se marie bien avec la tristesse de leur coeur. Elles voient la pierre qui a été roulée, le trou noir qui forme l'entrée de la tombe, l'espace sombre qu'on devine à l'intérieur, le vide laissé par celui qui aurait du être là t qui n’y est plus! Ce que Madeleine constate ce n'est que de l'absence Elle n’a pas l’âme à la fête. Rien pour réchauffer son coeur et lui redonner un peu d'espérance. La mort de Jésus a été un scandale!

Combien de nos concitoyens, femmes et hommes de chez nous vivent cette situation; les journaux ont parlé de choses bien tristes à l’occasion de la S.Sainte. On a déjà entendu parler du Christ vivant, il nous reste parfois quelques bribes de notre héritage chrétien mais qui n’ont plus beaucoup de poids. Plutôt ce qui frappe, quand on regarde le monde autour de soi c'est comme un vide, une absence de Dieu; on voit partout de la souffrance, de la violence, la culture de la mort qui semble vouloir accaparer l’attention. Pour bien des gens, Dieu est mort en quelque sorte... on a enlevé petit à petit toute trace de sa présence dans l'organisation de la société et Lui ne semble pas sen'être objecté. On s'est accoutumé à voir Dieu mis à l'écart. Notre terre devient de plus en plus un lieu de détresse, où fleurissent le désenchantement, la morosité...

Revenons à notre vitrail. Voici qu'à un moment donné, à l'extérieur, quelques rayons du soleil percent les nuages. Quelque chose se met à vibrer, un éclat de lumière colorée attire notre regard. On ne voit pas très bien les dessins ou les formes, mais on sent qu’il y a là quelque chose de beau! En se forçant les yeux on distingue quelques motifs, un visage, une main, un pan de vêtement. Puis on a le réflexe de s'approcher, la curiosité a été piquée.
C'est cette seconde étape qu'ont vécue les femmes de l’Évangile, puis Pierre et Jean. Pierre entre dans le tombeau: il voit le linceul et le linge qui avait recouvert la tête de Jésus, roulés à leur place, disposés avec respect. Le corps est absent, mais Pierre reste là, figé, intrigué sans comprendre. Il n'a pas encore assez de lumière en lui pour tout saisir: il lui manque la foi pascale. Ce pourrait-il que tout celà soit vrai, ce que Jésus avait annoncé de sa Résurrection...

Cette attitude est aussi celle de bon nombre d'entre nous. Nous acceptons les données de la foi, nous aimerions y croire, mais il manque quelque chose. Notre foi est encore dans la lumière naissance, dans son aurore. Nous préférerions peut-être en rester là de peur que ça bouleverse nos vies. Croire que Jésus est vivant, qu'il est sorti de la mort, ça n'a presque pas de bon sens. Nous sommes en recherche, nous avons besoin d'explications, car il y a tellement de théories qui circulent. C'est peut-être plus confortable de croire à la réincarnation, moins engageant aussi.

Or voici que le soleil se dégage de sa couverture de nuage. Le vitrail alors resplendit: les couleurs se mettent à chanter, l'image se découpe radieuse, resplendissante. Il n'y a plus de comparaison avec ce qu'on avait vu plus tôt. C'est désormais un plaisir pour l’oeil: plus besoin de mots d'explication, on comprend avec son coeur le sens de ce qui est exprimé là, on est comme saisi par un mystère qui nous dépasse.

C'est ce qui est arrivé à Jean comme aux saintes femmes. Lorsque le disciple que Jésus aimait est entré dans le tombeau il voit les mêmes signes que Pierre. Mais il les regarde à la lumière de l'amour qu'il a pour le Seigneur et il comprend. Il a vu et il a cru, nous dit l'Évangile. Devant ce qu'il voit, son cœur lui chante que la vie est plus forte que la mort et que Jésus est vivant. Cette foi, l'Église naissante l'a découverte petit à petit à travers les signes que le Ressuscité lui a donnés et l’annonce de cette Bonne Nouvelle, ça dure depuis 2000 ans.

C'est la fête de Pâques, le mémorial de la résurrection du Seigneur. Nous n'avons plus, bien sûr, devant les yeux le tombeau vide. Ce qui nous reste c'est la foi des témoins, la foi pascale parvenue jusqu’à nous et que l'Esprit-Saint ravive en nos coeurs. Elle nous murmure que le Christ est vivant au milieu de nous et qu'Il nous inonde de sa lumière. Et à notre tour, comme Marie-Madeleine, comme Pierre et Jean, nous sommes invités à en devenir des témoins par notre joie de vivre, par notre ardeur à faite face à l'avenir. Puissions-nous être pour ceux qui demeurent plongés dans la pénombre des signes d'espérance!

Nous avons répété souvent depuis le début du carême “Confiance, Dieu tient Parole!” “Eh bien, toi qui es le Vivant remets en nos coeurs cette joie à l’occasion de cette belle matinée de Pâques!”

jeudi 25 mars 2010

Homélie 5e dimanche du Carême

“Que celui qui est sans péché...”

Les scribes et les pharisiens amènent à Jésus une femme qu’on avait surprise en train de commettre l’adultère. Ils se veulent les fidèles défenseurs de la loi de Moïse; c’était leur devoir. Pourtant leur démarche justement, n’est pas conforme à cette loi qui disait: “surpris dans cette situation, ils seront mis à mort tous les deux, l’homme et la femme”. Pourquoi est-ce qu’ils amènent seulement la femme alors que l’homme a du pouvoir s’enfuir? Par ailleurs, ce n’est pas le souci de la gloire de Dieu qui les anime. Ils voulaient mettre Jésus à l’épreuve, afin de pouvoir l’accuser... La même tentation pourrait peut-être nous guetter si nous nous servions de notre bonne image pour accuser les autres.

C’est une scène bien connue qui nous est présentée aujourd’hui. Elle est dominée par deux regards portés sur cette femme. Il y a d’abord le regard des pharisiens, un regard froid; ils regardent la femme à travers les lunettes de la Loi de Moïse. Celle-ci était impitoyable: les deux coupables devront être mis à mort. Mais les supposés observateur de la Loi l’avait arrangée avec le temps, à leur avantage. C’était seulement la femme désormais qui devait subir ce sort. Au temps de Jésus, en fait, on considérait les femmes comme des servantes, inférieures aux hommes. Alors la femme n’a aucune chance de s’en sortir. Coupable, elle doit être lapidée, un point c’est tout!. Nous touchons ici du doigt combien une mentalité, une religion qui se fonde seulement sur la loi peut devenir un carcan qui étouffe et peut faire mourir. Et quelle image de Dieu cette religion offre-t-elle, d’un Dieu qui commande de tuer?

Il y a aussi le regard de Jésus. Il n’est pas venu pour juger, mais pour sauver, pour sortir ses frères et sœurs de ce que s.Paul appelait la malédiction de la Loi. Jésus ne voit pas d’abord dans cette femme son péché. C’est certain que l’adultère est un péché pour Jésus, mais il ne réduit pas cette femme à sa faiblesse. Il voit en elle un être humain qui n’est pas arrivé à aimer vraiment.

Alors Jésus s’était baissé et du doigt il écrivait sur le sol. Une leçon pour nous. Il ne veut pas entendre dire du mal des autres. S’il déteste le péché, il aime le pécheur. Son attitude est claire. Les accusations ne l’intéressent pas. Il ne fixe pas son regard sur la femme sans doute recroquevillée devant lui. Il ne regarde pas non plus ceux qui l’accusent méchamment. Jésus veut leur bien à tous, autant à l’accusée qu’aux accusateurs. Ceux-ci se pensent dans leur bon droit, ils ne veulent pas comprendre. Jésus va les mettre devant leur conscience. “Que celui qui est sans péché...”Demandons au Seigneur de nous rappeler ces mots quand nous sommes tentés de juger. “ Fais-nous partager ta miséricorde. Donne-nous ton regard pour voir les autres comme toi tu les vois. Viens changer notre cœur pour arriver à aimer comme toi.”

Jésus savait mieux que quiconque que, pour pouvoir aimer en vérité, nous avons besoin de nous sentir aimés en vérité. Nous ne pouvons pas nier en nous cette recherche, souvent sans doute maladroite, même faussée. En fait recevoir de l’amour pour pouvoir en donner. Jésus voit que cette femme n’est pas encore aimée pour elle-même. Elle reste pour les hommes qui la fréquentent comme un objet. Elle sent le genre de regard qu’on porte sur elle, le jugement des biens pensants. Alors Jésus ne tient pas compte des chemins qu’elle a empruntés pour tenter d’être aimée. Il la voit dans le regard d’amour que le Père porte sur elle. Si Jésus l’avait condamnée, il aurait fait une œuvre de mort, alors qu’il est venu pour que les gens aient la vie et la vie en abondance. Il fallait révéler à cette femme combien elle est aimée gratuitement par un Dieu qui est son Père. C’est vrai aussi pour nous quand nous sommes pécheurs et hésitons d’accéder au pardon. C’est parce que nous n’avons pas encore assez découvert combien nous sommes aimés d’un amour infini. Le seul chemin pour en sortir, c’est d’avoir la chance de rencontrer nous aussi le regard de Jésus. Le sacrement du pardon, s’il n’est pas le seul, est encore le meilleur chemin pour y parvenir.

Les autres lectures de ce dimanche vont dans le même sens. Dans la première, le prophète Isaïe s’adresse à des gens qui désespèrent de voir venir le jour où il seront libres et maîtres de leur destin. Il leur est promis la venue de ce jour; Dieu lui-même s’en occupera. L’enseignement de Jésus va confirmer cette annonce et va la conduire à sa perfection. Dieu pardonne à son peuple, le libère finalement et le fait revivre. Paul, ensuite, lui, le persécuteur des disciples de Jésus, rappelle comment il a été transformé à la suite de sa rencontre avec le Ressuscité. Oubliant ce qui se trouve derrière lui, il fonce en avant, soucieux de toujours mieux connaître le Christ et de vivre pleinement avec Lui. Dieu nous appelle aussi à cela: oublier ce qui est en arrière, tourner la page, regarder en avant, en demeurant convaincus que, quoi qu’il nous arrive, le Seigneur nous appelle à vivre. Confiance, Dieu tient Parole!

mercredi 17 mars 2010

4e dimanche du Carême 2010

L’ENFANT PRODIGUE


Nous venons d’entendre certainement une des plus belles pages de l’évangile, tant jeune, je me suis longtemps demandé‚ ce que ça voulait dire prodigue (pas un enfant prodige!). Enfin je me suis risqué de regarder dans le dictionnaire et j’ai vu que ça signifiait: quelqu’un qui est dépensier, qui dépense sans calculer.. Peut-être aussi qui gaspille sans réfléchir. C’est ça le fils prodigue!

Mais si on regarde de plus prés l’évangile, on constate que le personnage central sur lequel on attire notre attention, c’est plutôt le Père; c’est lui qui est prodigue, mais plutôt généreux en bonté‚ et en pardon. Il faudrait peut-être remplacer le titre de l’évangile par la parabole du Père-tendresse. N’oublions pas que c’est Jésus qui nous parle ainsi de son Père et de notre Père du ciel. Un portrait étonnant,
d’une largesse inouïe, exagérée dirions-nous!

Notre Dieu est un Père prodigue en miséricorde

-dans sa patience: il attend fiévreusement le retour de son fils. Il ne donne pas d’ultimatum comme nous le ferions si facilement: C’est la dernière fois que tu me fais ce coup-là; la prochaine fredaine, tu sais, c’est la porte. Que son enfant revienne, c’est sa préoccupation quotidienne.

-dans son pardon: il ne demande pas de compte à son fils, n’exige pas une confession rigoureuse de tous ses méfaits. Il ne veut pas le diminuer davantage, il l’a assez humilié jusque là! Il ne calcule pas non plus, comme nous, on aurait peut-être dit : Mon garçon je te pardonne ton coup de tête, mais arrive-moi pas avec un casier judiciaire parce que là, je te déshérite...

-dans son respect: il ne profite pas de la situation pour démolir son fils, genre: je te l’avais bien dit, si tu m’avais écouté, tu as voulu faire à ta tête de pioche, ce n’est pas moi qui vais payer pour tes erreurs!

-dans son accueil: il tend les bras, il oublie le passé il tourne la page. Il ne dit pas: je te pardonne à condition que tu fasses ceci ou cela. Il sait bien que c’est le pardon qui finira par changer le cœur du garçon; ce n’est pas le changement éventuel qui mériterait le pardon, mais le contraire. Donc, pas d arrière-pensée de revanche!

-dans sa joie: elle est si profonde, si sincère... comment douter de son amour. S’il accueille son fils ce n’est pas pour bien paraître devant les autres, ou par bonne conscience pour être en paix avec lui-même. C est uniquement parce qu’il est amour, qu’il aime son enfant démesurément. Son retour à la maison est la source de sa joie! Nous sommes bien loin de nos calculs mesquins, c’est plutôt la générosité extrême de notre Dieu qui nous est rappelée. Le fils aîné qui est resté fidèle en est scandalisé surtout devant la fête qui s’organise, les vêtements neufs, les dépenses. En écoutant ce texte on devrait se dire en chacun de nous: et si je croyais vraiment moi aussi que je suis le bien-aimé‚ de Dieu, l’immensité de sa joie quand je reviens vers lui... est-ce que je n’irais pas plus souvent me jeter dans ses bras pour goûter la joie d’être pardonné d’être sauvé.

J’ai à reconnaître que je peux être de quelque manière à l’occasion un fils/fille prodigue quand j’abuse sans réfléchir du cadeau de ma santé, quand je n’entretiens/cultive pas le cadeau royal de ma foi: peut-être aussi, en polluant le cadeau de la belle nature; quand je m’éloigne pour une longue période de la maison familiale, l’église de Dieu, que je juge si peu attirante (c’est sûr que la télé ou l’internet sont tellement plus distrayants); quand je laisse perdre de bonnes inspirations, des grâces que Dieu me donne.Trouver le bonheur d’être accueilli tel que je suis par un Père qui m’aime, un Père-tendresse, c’est finalement la joie du sacrement du Pardon... curieusement un sacrement pas assez fréquenté, qui fait peur, dont on a perdu le sens. Le fils avait remâché lui aussi 56 raisons de ne pas revenir; c’est quand il a pris son courage à deux mains, qu’il a fait un geste de repentir, qu’il est entré dans la joie et la lumière, qu’il a été réintégré dans l’amour.

Je suis peut-être aussi à la fois le fils aîné, celui qui est resté fidèle, bon pratiquant, même engagé dans mon milieu, mais qui est déçu de la trop grande indulgence de Dieu envers les distants ou les ouvriers de la dernière heure; déçu que mes mérites et mon travail ne soient pas assez reconnus. Déçu que Dieu ne se pose pas en justicier pour faire le grand ménage en balayant tout ce qui traîne, les indifférents, les ennemis de la foi... A nous aussi le Père nous dit: pourquoi te plaindre, tu es mon enfant et tout ce qui est à moi est à toi! Serais-tu envieux parce que moi je suis bon? Dom H. Camara disait: le fils cadet s’est réveillé de ses péchés; il faudrait que le fils aîné, lui, se réveille de sa bonne conscience, se distancie de ses vertus et de ses mérites, de sa bonne conscience!

Résumons:

Au-delà de tout ce qu’on pourrait prévoir si on suit la pente du gros bon sens, Dieu notre Père attend patiemment mon retour. Au-delà de toute convenance, il se réjouit et m’accueille quelque soit mon péché. Il ne me demande que le regret de mes fautes et le ferme propos, i.e. l’intention bien arrêtée de me reprendre, de m’améliorer. Dieu est Dieu, ses chemins ne sont pas les nôtres, son amour est sans limite. Bien sûr, nous sommes faibles, mais nous sommes toujours les enfants du Père. Bien sûr nous sommes pécheurs, mais nous sommes les bien-aimés de Dieu. Et à ses yeux, c’est tout ce qui compte! Bonne nouvelle qu’il faut sans cesse se redire! Aujourd’hui encore Dieu nous tend la main! (Dimanche le 21 mars, 15h00, le sacrement du Pardon nous est offert, à nous d’en profiter!)

mardi 9 mars 2010

Homélie 3 ieme dimanche du Carême Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même

“Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même”. On venait d’informer Jésus des événements qui avaient occupé les actualités de son époque: des soldats avaient massacré des gens sur l’esplanade du Temple et une tour en construction était tombée, entraînant la mort de 18 personnes. Au lieu de commenter les faits, Jésus lance cet avertissement: “Convertissez-vous!” Si on rapportait à Jésus les récents tremblements de terre qui ont causé des milliers de mort en Haïti et des centaines au Chili, en plus des inondations un peu partout sur la planète, qu’aurait-il répondu? La même chose sans doute! C’est une invitation à vous convertir... On peut être surpris de la dureté de ces propos. Comment les interpréter? On se serait attendu à des paroles de compassion, de sympathie, car Jésus à plusieurs autres occasions en avait montré envers les victimes des malheurs, les proches des défunts, les malades. Comment concilier la rudesse de ces paroles avec la douceur habituelle de son comportement?

Qu’est-ce que Jésus veut nous dire aujourd’hui sur nous-mêmes et sur le monde actuel? Qu’est-ce qu’il cherche à nous révéler sur l’avenir, à nous dévoiler aussi sur le mystère de Dieu? A ses contemporains comme à nous-mêmes Jésus fait une invitation à porter un regard lucide sur la réalité de notre monde. On ne vit pas dans le meilleur des mondes. La planète n’a pas fini de bouger, de s’ajuster dans ses profondeurs. Face à une certaine naïveté qui voudrait se persuader que l’humanité progresse lentement vers un avenir meilleur, Jésus nous rappelle la présence réelle du mal, de l’imperfection, de la finitude du monde matériel comme de notre humanité. Mais il ne s’arrête pas là: ce serait trop facile pour nous de dire: “les temps sont bien durs, c’est bien terrible” et d’oublier notre propre responsabilité.

A ceux et celles qui l’écoutent, Jésus rappelle que le premier combat à mener c’est celui de notre propre coeur. “Si vous ne vous convertissez pas...” Il ne s’agit pas évidemment de pleurer sur nous-mêmes, de nous lamenter, de nous stresser, de dire: “Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu?” Il faut au contraire prendre conscience de notre mission de baptisés. Jésus est venu sauver ce monde, il est venu annoncer l’amour invincible du Dieu vivant. Nous avons à nous en convaincre pour nous-mêmes et à le faire connaître autour de nous. Donc: confiance, Dieu tient parole!

Comme l’affirme s.Paul dans la seconde lecture: “Ces événements étaient destinés à nous servir d’exemple”, à nous sortir de cette sorte d’engourdissement, d’indifférence, qui est très répandue de nos jours, à secouer notre passivité. Si nous désirons que les choses changent, si nous désirons que l’Évangile transforme notre propre coeur, il faut d’abord nous convertir.

En quoi consiste cette conversion? Dans le langage biblique, se convertir signifie changer de direction, se retourner vers quelqu’un ou quelque chose. Vers quoi ou vers qui aller? Le Christ nous propose le chemin qui mène vers son Père et nous avertit qu’il n’y a pas de temps à perdre. Il faut quitter sans tarder nos servitudes, mettre plus d’engrais sur nos plantes stériles. Ça ne se réalisera pas en un jour, il faut y mettre du temps. Jésus, par la parabole du figuier, nous enseigne la patience de Dieu. Il ne mesure pas sa grâce sur une balance, il nous apporte son soutien à tous les jours. En bon vigneron il déploie inlassablement des efforts pour que nous donnions du fruit. Il le fait dans l’espoir que nous revenions à Lui. Il peut nous arriver des creux de vagues, comme le figuier qui n’avait pas produit pendant trois ans. Ce carême, c’est entre autres le moment de retrousser nos manches afin de recommencer à porter du fruit. En Église, nous traversons aussi des épisodes d’épreuves et de crise. Il nous revient de voir ce qui continue de pousser pour l’entretenir de notre mieux.

Les paroles de Jésus vont donc plus loin qu’une simple invitation à la conversion. Nous risquerions de tomber dans le désespoir à la vue de notre propre insuffisance, si nous ne voyions pas que Dieu lui-même vient à notre secours. S’il veut que nous changions le monde en commençant par changer notre coeur, c’est lui qui le prend en grande partie sur ses épaules. C’est lui qui prend patience, qui donne des chances, qui recommence à travailler le sol, là où on ne voyait plus d’espoir.C’est lui qui vient nourrir, de sa propre mort sur la Croix, la stérilité de nos vies.

Un musulman disait un jour à un chrétien: “Vous êtes chanceux, vous les chrétiens, si c’est vrai, que Dieu soit venu en personne vous rencontrer, vous parler et vous dire son nom, à savoir qu’il est un Père. C’est merveilleux que Dieu se présente ainsi et que son Fils vous parle d’un Dieu plein d’amour”. La tradition musulmane donne 99 attributs à Dieu. Le 100e pour nous c’est qu’il est Père, un Père qui aime sans condition. Moïse avait eu une première révélation dans le buisson ardent, mais bien mystérieuse. Mon nom est “je suis celui qui suis”.Pour l’instant “regardez-mois bien faire!”... c’est donc difficile de lui imposer une étiquette. Il était jusque là pratiquement inconnaissable. Il a fallu une longue évolution dans le peuple d’Israël et l’arrivée de Jésus pour que nous soit enfin dévoilé son vrai nom.

Alors que de terribles événements assombrissent les temps que nous vivons, Jésus veut nous rappeler que le chemin de la paix et d’un monde meilleur passe par notre propre conversion, une conversion personnelle et convaincue. Alors, comme Moïse, nous pourrons affronter les tempêtes, les dangers et nos propres peurs, appuyé sur Celui qui seul peut nous sauver, c’est Celui qui est, que nous connaissons maintenant comme un Père plein d’amour.