vendredi 1 octobre 2010

HOMÉLIE DU DIMANCHE 26 sept 2010

RÉFLÉCHIR ET METTRE LES PENDULES Á L’HEURE

Les milieux politiques et sociaux prennent de plus en plus conscience de la cassure entre les riches et les pauvres, à l’échelle de la planète, mais aussi dans nos propres milieux. La parabole de ce dimanche veut nous y faire réfléchir et mettre les pendules à l’heure si possible.

Le récit de Jésus met en scène deux hommes situés aux deux extrémités de l’échelle sociale de son époque. Il y a un super-riche gavé de bonne nourriture qui porte des vêtements de luxe et à sa porte, un pauvre hère qui se meurt dans un état de délabrement total. Il n’est pas dit que le riche soit un mauvais homme, il ne maltraite pas le pauvre, il ne le chasse pas, mais il l’ignore carrément, aveugle à sa situation.

Est-ce que ça ne ressemble pas au contraste que nous constatons actuellement? Sur la planète une population à l’aise, avec des dépenses parfois luxueuses, et tout près, vus par l’intermédiaire des médias, des millions de gens qui meurent de la faim, du sida ou de la violence guerrière. Qu’on pense à Haïti qui en plus, a subi un tremblement de terre, qu’on pense au Pakistan avec plusieurs millions de personnes déplacées, d’autres pays où l’on s’entend pour parler de nouveaux génocides. On est devant un monde brisé en deux.

Alors que le riche de la parabole semble indifférent, insensible, imperméable à la misère de Lazare, parce qu’il ne la voit pas... nous on ne peut pas l’être, à moins de fermer les yeux. Il m’arrive des fois à la télé de changer de poste parce que ce que j’y vois est intolérable, v.g. la souffrance des petits enfants africains qui meurent de faim. On pourra dire que le monde est bien mal fait... la faute n’en revient pas au Seigneur. Ce monde a été créé avec des ressources considérables, suffisantes, pour que les humains y vivent en frères et soeurs , en se partageant les richesses et les biens naturels. Mais la tendance à accumuler, à garder égoïstement pour soi est inscrite dans la nature, à moins qu’on en prenne conscience et qu’on la corrige avec la grâce et la lumière de Dieu.

Cette parabole nous avertit des dangers de la richesse qui peuvent refermer une personne sur elle-même et la porter à détourner son regard des autres. Le riche de la parabole n’a plus le temps de se décentrer de son bien-être et de voir le pauvre à sa porte. Il ne lui fait pas de mal, il l’ignore. C’est l’abbé Pierre qui disait: “il serait bon qu’on ait une petite fenêtre cassée en hiver quelque part au sous-sol ou dans son garage, pour qu’on sente le froid qui fait grelotter le pauvre ou qu’on entende son appel à l’aide!” Un passage frappant de la parabole c’est l’abîme que le riche constate après sa mort entre lui et la patrie d’Abraham où le pauvre a été recueilli. On pourrait croire qu’il y a là un châtiment, la conséquence d’une punition de Dieu. En réalité le fossé entre le riche et le pauvre avait été creusé bien avant, sur la terre; dans l’au-delà il devient un abîme qu’on ne peut plus franchir. Jésus avait dit d’ailleurs: “Tout ce que vous n’avez pas fait au plus petit d’entre les miens, c’est à Moi que vous ne l’avez pas fait.” Le riche n’a pas été seulement dur de coeur, mais un peu myope et assez dur d’oreille.

On notera que Jésus nomme le pauvre homme du nom de Lazare, ce qui veut dire en hébreu “Dieu aide”.... Dieu relève le pauvre, il lui viendra en aide un jour. Il n’a aucun appui sur le présent, il est tout entier tourné vers Dieu et son Royaume de justice. Voilà la grâce qui l’habite. Si Dieu ne l’exauce pas tout de suite, c’est peut-être pour qu’il soit une question, un signal, une interrogation qui pourrait secouer le riche et peut-être le sauver. Il lui rend service en quelque sorte en lui permettant de sortir de sa torpeur et de partager un peu de ses biens. C’est en ce sens qu’on parle souvent dans les évangiles des situations inversées: Dieu élève les humbles et renvoie les riches les mains vides...

Le riche finalement plaide pour ses frères qui sont encore vivants; il demande à Abraham de leur envoyer une sorte de fantôme, une apparition spectaculaire qui pourrait leur faire peur! Celui-ci lui répond: ils ont Moïse et les prophètes... qu’ils les écoutent. Ils ont aussi des pauvres qui leur tendent la main. En somme, la foi est une décision personnelle qui ne peut être provoquée de façon magique ou par la peur.

On pourrait se dire face à ces propos: nous on n’est pas immensément riches, on n’a pas ces grandes fortunes. Ces richesses qui me ferment les yeux ce serait plutôt tout ce qui m’accapare et aveugle mon coeur, ce qui m’empêche de porter attention aux autres, de partager avec eux mon amitié, mon temps, mon écoute et même parfois mon pain. Félicitons-nous des gestes de partage que nous posons par ailleurs. Il y en a heureusement! Par exemple, notre projet Brompton-Haïti.

La conclusion de cette parabole est la même que celle de dimanche dernier. Jésus nous dit: au lieu de faire de l’argent le socle ou la base de son existence pour finalement être déçu, qu’on s’en serve donc comme un instrument de partage, de communion, qu’il devienne l’expression de notre souci des plus faibles. Mgr Blanchet, ancien évêque de Gaspé écrivait déjà: “.... les siècles futurs ne jugeront pas notre début du 21e siècle sur son matérialisme, sur sa permissivité sexuelle ou sur les difficultés du couple ou de la famille...mais sur le fait qu’à des milliers d’exemplaires Lazare est mort de faim à notre porte, tout près de nos tables bien garnies...” Les personnes qui ont eu déjà l’occasion de vivre quelques jours en Haïti... en retiennent une expérience qu’elles n’oublient pas; pour ma part je la souhaite à qui voudrait bien la tenter...

Demandons au Seigneur ce (matin) d’ouvrir nos yeux et nos oreilles afin de percevoir sur la planète ou plus près de nous la situation ou la voix de celui/celle qui vit dans la détresse. Ouvre mon coeur Seigneur!

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