vendredi 12 novembre 2010

HOMÉLIE DU DIMANCHE 14 NOV 2010

L’ANNONCE DE LA FIN DU MONDE

Comme si tous les malheurs actuels ne suffisaient pas.... Comme si la crainte du réchauffement de la planète, les menaces terroristes, les désastres écologiques, la pollution, les inondations les rumeurs de guerre, etc... vous allez dire: pourquoi l’évangile vient en rajouter avec l’annonce de la fin du monde? Pour nous aujourd’hui, quel sens peuvent avoir ces lignes ce matin? Comment çela a pu avoir du sens pour les personnes de toutes les époques qui ont entendu ces paroles (car il y a toujours eu dans le passé des malheurs, en quelque part sur la planète.)

C’est plutôt un avertissement que nous fait Jésus. “Ne vous laissez pas égarer, car beaucoup viendront en mon nom... Ne marchez pas derrière eux!”. Cette mise en garde est toujours d’actualité: notre époque a vu apparaître toutes sortes de gourous qui abusent de la naïveté des gens. Des faux christs qui utilisent les catastrophes actuelles pour dominer et entraîner certaines personnes plus fragiles ou angoissées sur des chemins sans issue, sinon pour profiter de leur porte-monnaie. Depuis les années 60 c’est par centaines qu’on dénombre les groupes sectaires au Québec et parmi eux des spécialistes en prédiction de la fin des temps. “Ne vous laissez pas impressionner”, dit Jésus. Que penser de la prédiction de la fin du monde pour le 21 décembre 2012?

Comme les disciples émerveillés par la beauté du temple de Jérusalem (une des merveilles du monde à l’époque) nous admirons nous autres aussi les prouesses de la technique actuelle: la diffusion de l’internet, l’électronique miniaturisée, la conquête spatiale, les miracles des nouvelles méthodes de chirurgie, etc... et pourtant il y a des fragilités dans tout cela. La distance croissante entre les riches et les pauvres, les licenciements, les scandales financiers sont un danger pour l’équilibre social et mondial; quand la justice est bafouée, la paix est menacée. Nous sommes plus vulnérables qu’il paraît: une panne électrique générale, une inondation, un ouragan, un nouveau virus plus résistant et l’édifice est secoué. La menace terroriste fait trembler bien des pays. La perte des repères et des valeurs morales cause le désarroi de bien des personnes, dont des jeunes qui ne savent plus distinguer entre le bien et le mal, le virtuel et le réel. Dans nos vies bien des choses peuvent basculer du jour au lendemain. La vie est si fragile... on le chante à la radio!

L’Évangile nous invite donc de façon pressante à rechercher le roc solide de la foi et de la Parole de Dieu pour appuyer nos vies. Notre assurance vient du Seigneur. C’est par votre persévérance, votre constance que vous obtiendrez la vie. “N’ayez pas peur”.. c’est aussi la parole prophétique de Jean-Paul II au tout début de son pontificat. Elle rejoignait celle de Jésus à ses disciples avant son grand départ. Il s’agit entre-temps de rendre témoignage sereinement, positivement de ses convictions, même si elles causes des rires ou des moqueries. “Tu crois encore à ça, toi!” Dans ces moments-là ne vous préoccupez pas trop de trouver les mots, il vous sera donné un langage de sagesse qui vous surprendra vous-mêmes. Ça vous est peut-être déjà arrivé. “.Ne craignez pas, relevez la tête, votre délivrance est proche” dit Jésus!

Le témoignage le plus convaincant n’est pas celui des discours éloquents, mais celui des actes. C’est le sérieux apporté à nos tâches quotidiennes, une certaine détente et une joie de vivre, la confiance en l’avenir, qui parlent le plus fort. S. Paul reprochait justement à de jeunes communautés de s’être laissées démoraliser à cause d’une attente mal comprise du retour du Seigneur.

La destruction du temple qui est arrivée effectivement dans les années 70 n’a rien changé dans l’attitude de Dieu à l’égard de ses enfants. Il est resté fidèle à son alliance. Même, il a édifié désormais un nouveau temple, c’est le grand Corps de Jésus ressuscité dont nous sommes les cellules, les pierres vivantes. Jésus nous appelle donc à la paix intérieure, à la sérénité! Pas un cheveu de votre tête ne sera perdu: consolant pour ceux qui en ont moins...

L’Eucharistie nous aide à tenir bon dans nos convictions. Elle fait grandir notre union avec le Seigneur et entre nous. Elle nous aide à devenir des signes de sa présence au milieu d’un monde inquiet. Elle contribue à construire le nouveau Temple spirituel où Dieu est adoré en esprit et en vérité.... c’est l’Église, la communauté que nous formons. Par ailleurs, avouons-le, une Église elle aussi fortement secouée....

En fait, nous assistons plutôt à la fin d’un monde, d’une époque: aussi, à la fin d’une manière de faire Église. A nous de travailler à faire venir le Jour du Seigneur, d’inventer une nouvelle manière de vivre en paroisse, dans des regroupements dont on n’a pas le choix mais qu’il faut inventer. Tout en nous engageant pour plus de justice, pour contrer les préjugés, en dénonçant les combats d’arrière garde. Rappelons-nous les paroles de Jésus: “Je vous inspirerai moi-même un langage et une sagesse à laquelle tous vos adversaires ne pourront opposer ni résistance, ni contradiction,... C’est par votre persévérance que vous obtiendrez la vie...”

mercredi 3 novembre 2010

HOMÉLIE DU DIMANCHE 7 NOV 2010

LA VIE APRES LA MORT

Le mois de novembre nous offre l’occasion de réfléchir un peu plus sur la mort. On a beau chasser de notre esprit cette perspective obligée, elle est toujours là. Accident, suicide, cancer, etc. Dans une même famille l’un meurt à trente ans, l’autre à 90 ans; celui qu’on considérait comme un bon gars meurt jeune, l’autre qui a une vie déréglée semble immortel. On dit: c’est pas juste. Le vieillard malade depuis longtemps dira: le bon Dieu m’a oublié!

Autrefois la mort était marquée par la crainte du jugement, la peur de l’enfer. Les rites funéraires étaient austère, tragiques. “Dies irae, dies illa” chantions-nous, “jour de colère que celui-là!” L’église des funérailles était tapissée en noir de même que les vêtements liturgiques. Aujourd’hui c’est le contraire. On dit plutôt: la personne est partie pour un monde meilleur. On a tendance à atténuer l’idée du deuil, de la rupture. On célèbre davantage la vie de la personne défunte. Au salon, on va projeter des photos qui la montrent lors d’un repas, jouant au golf ou avec ses petits enfants.

Autrefois on cultivait beaucoup la mémoire: un long temps de deuil, messes anniversaires, visites nombreuses au cimetière. Maintenant il arrive qu’on veuille faire vite, comme pour chasser un mauvais souvenir: quelques heures au salon ou à l’église, corps non exposé, incinération. On ne célèbre plus la mort, on l’expédie. Une enquête tend à révéler qu’une personne sur trois décédée au Québec ne ferait l’objet d’aucun rite formel de funérailles. Beaucoup de cendres ne sont jamais réclamées par les proches du défunt ou encore dispersées au vent dans un coin de nature; ce qui indique l’indifférence des vivants à l’égard de leurs morts ou du moins l’inconfort d’y penser. Et il nous reste quand même une question brûlante, lourde de sens, autrement profonde, sur la signification de l’existence humaine: y a-t-il une vie après la mort?

Il est difficile de nous représenter une vie après la vie sans puiser dans les réalités de la vie actuelle. On rêve de paysages luxuriants, à des îles enchantées, à des parties de chasse ou de pêche fabuleuses. Chacun s’invente un ciel selon ses pulsions ou ses désirs. Les musulmans parlent d’un jardin de délice avec de jeunes vierges... Ou encore, quelqu’un qui croyait à la réincarnation disait: je vais pouvoir revenir pour utiliser les nouveaux gadgets toujours plus performants qu’on voit dans les films de science-fiction, les voyages dans l’espace... l’autre plus prosaïque disait: je vais pouvoir retourner chez McDonald!

Quel lien avec l’Évangile d’aujourd’hui? Justement, des gens qui ne croyaient pas à la résurrection, les sadducéens, imaginaient celle-ci comme une copie de la vie présente. La loi de Moïse obligeait un jeune frère à épouser la veuve de l’aîné, si celui-ci était mort sans laisser d’enfant. Engendrer un enfant, pour les juifs, c’était comme prolonger son existence. Mourir sans enfant c’était comme disparaître définitivement. Alors on tentait de ridiculiser Jésus avec ce cas où sept frères auraient épousé la même veuve... on imagine quelle belle chicane une fois rendus au ciel.... Jésus leur dit: quand je vous parle de résurrection, vous n’avez rien compris. La résurrection des corps ça ne veut pas dire la réanimation d’un cadavre une fois rendu dans l’au-delà ou à la fin des temps. C’est l’accomplissement de toute la personne, corps et âme, esprit et mémoire, dans une vie transformée. Il faut parler de toute la personne vivant dans la lumière et la paix de Dieu. Quand on parle de corps dans la langue de Jésus on désigne toute la personne et non le soutien matériel seul, physique, qui se détruit.

On risque dans la pensée courante d’imaginer l’autre monde comme une amélioration du monde présent: plus de santé, plus de confort, plus de plaisirs, plus de musique, etc... mais l’expérience sérieuse de notre vécu devrait nous conduire vers d’autres horizons. Qu’est-ce qui est essentiel dans la vie: est-ce posséder une maison, une grosse voiture, ramasser de l’argent? Toutes sortes de choses qu’il faut quitter un jour: la maison vers un appart ou le CHLD, la voiture pour la marchette, le compte de banque pour le testament. Ce qui reste vraiment ce sont les relations que nous avons tissées: les amitiés, les amours, la tendresse donnée, les pardons accordés, l’espérance semée et les joies partagées. Il faut une vie pour apprendre cette leçon, pour passer de l’environnement des choses matérielles à la transparence de l’amour, de l’accueil, de la bonté. C’est de ces réalités que l’au-delà est fait. Ce sont elles seules qu’on apporte avec nous, celles qui ont modelé notre vraie personnalité et qui survivent dans la résurrection. En somme, il faut traverser la vie pour finalement rencontrer Dieu. Celui que Jésus appelle “Père”, le Dieu des vivants.

La résurrection, c’est vivre en Dieu, comme une planète autour du soleil, entrer dans son attraction, y trouver la plénitude, toute notre personne étant transformée. Il n’y a pas de mots pour dire cela. Des fois, une perception ou une expérience peut en donner un petit aperçu, un flash, comme dans un grand amour, devant un coucher de soleil, la beauté d’une fleur ou d’une mélodie. Certains grands musiciens ont créé des œuvres qui nous amènent près de l’éternité. Dans la foi, on peut saisir alors que la vie éternelle est déjà commencée, car en Dieu, même fragiles et mortels, nous recevons des bribes de cette vie. Nous sommes filles et fils du Père, héritiers de la résurrection. C’est normal qu’on reçoive de petits avant-goûts de notre héritage. Gardons l’oeil ouvert et surtout donnons plus de place dans nos vies à la Parole de Dieu qui, sans le décrire, nous dit des choses importantes sur l’au-delà.