lundi 14 septembre 2009

LES PAROLES

LES PAROLES


Homélie 22e dim. ord. 09

Ma vieille mère qui vient d’avoir 100 ans n’était pas très emballée à l’idée de déménager dans une résidence pour personnes âgées. “Tous des vieux!” “Je vais souvent me retrouver seule; je n’aime pas jouer aux cartes avec des gens que je connais pas. Personne pour parler”. Elle exprimait une réalité fondamentale de notre condition humaine, celle d’être capable de faire des liens avec nos semblables, et pas trop différents. Nous sommes des êtres de relation. Nous portons en nous le besoin d’être proches les uns des autres. Or la parole est la façon essentielle pour nous les humains d’entrer en relation avec nos semblables. La parole est la grande porte par laquelle on accueille les autres et on entre chez eux. Elle est aussi la nourriture qu’on leur sert pour alimenter leur affection, leur estime de soi, nourrir leur âme. Elle est le soleil qui dit bonjour au début d’une journée et l’étoile qui rassure quand vient la nuit.

Ce besoin d’être proche se manifeste ainsi dans le domaine de la foi. Nous portons au fond de nous le désir d’être proche de Dieu. Or le moyen par excellence que Dieu a choisi pour se faire connaître, pour nous faire sentir sa présence et nous en nourrir, c’est pas des grands signes dans le ciel, c’est sa Parole:

-sa parole créatrice qui a formé l’univers et qui nous dit qui il est, (sa force, sa beauté, sa délicatesse, son humour), qui nous parle de sa splendeur éternelle.

-sa parole révélée déjà aux prophètes dans l’A.Testament qui un jour, sera rendue présente en son Fils (son Verbe) qui nous parlera en clair cette fois de son projet de salut pour tous ses enfants.

-sa parole qui est un cadeau qui nous est donné, contrairement aux animaux, qui nous peut révéler la profondeur et le mystère du coeur humain.

Sa parole nous rend, petit à petit, semblable à Lui. Vous avez sans doute remarqué comment un petit enfant apprend à parler. Vers 2-3 ans il répète tout ce qu’il entend autour de lui; les mots les plus beaux, des fois moins beaux, les couleurs, les chiffres, les expressions, les noms.... Grâce à ces paroles qu’il absorbe si rapidement, avec une mémoire fantastique, l’enfant devient de plus en plus un être humain à part entière. Il s’identifie d’abord à ses parents en assimilant non seulement leur langue, mais aussi leurs valeurs, leurs craintes, leurs joies, leurs rites religieux ou autres, leurs habitudes. On se retrouve parfois comme adultes avec des goûts, des peurs, sans raison, dont on se demande d’où ça vient; sans doute copiés de la petite enfance. En écoutant et en observant nos proches, on apprend à distinguer les comportements qui sont corrects comme ceux qui sont répréhensibles. Par la parole, l’enfant devient pour le meilleur et pour le pire, un peu et même beaucoup à l’image de ses parents.

St Jacques écrit, dans la 2e lecture: “Accueillez donc humblement la parole de Dieu semée en vos coeurs; elle est capable de vous sauver”. Cette petite phrase en dit beaucoup. D’abord, que cette parole ne peut rien faire en nous si elle n’est pas accueillie, écoutée attentivement. Puis méditée humblement, pour se laisser questionner, bousculer même. Cette parole vient de plus grand que nous, de notre source. Lui seul peut nous aider à nous accomplir, nous amener à notre achèvement, ou pour nous sauver, si on parle comme dit la Bible.

Cette parole a le pouvoir de nous transformer, un peu comme les paroles des parents transforment lentement l’enfant en un être humain complet. Comme disait l’autre: “écoute ton père quand ta mère te parle...” un travail d’équipe donc! Le but ultime de la parole venue de Dieu c’est de nous amener à Lui ressembler. Les lectures d’aujourd’hui insistent sur l’importance de mettre en pratique cette parole, de ne pas se contenter de l’écouter passivement. Elle nous est offerte non pas comme une simple information, une théorie mais comme un chemin de croissance.

Dans l’évangile d’aujourd’hui, Jésus nous met en garde contre un genre de paroles, des rengaines qui nous font croire quand on les multiplie, que nous sommes proches de Dieu, ou simplement en observant des rites. Jésus faisait de graves reproches aux pharisiens qui étaient des spécialistes là-dedans. “Vous annulez la Parole de Dieu par les traditions purement humaines que vous imposez”. Les plus beaux rites peuvent devenir des illusions qui nous éloignent de Dieu, si nous les faisons pour nous donner bonne conscience. Ils nous éloignent de Dieu au lieu de nous rendre à son image.

C’est pourquoi il est important de nous exposer à sa parole telle qu’elle est proclamée. Elle est souvent décapante, parfois secoue nos idées toutes faites. On prend conscience qu’il y a une double vérité: celle qu’on s’est forgée vaille que vaille au cours des années et celle que Dieu nous propose. Sa parole nous dit que nous sommes des créatures, souvent menacées par des mouvements de mort et d’égoïsme. Des créatures dont le coeur est compliqué, malade, parfois source de ce qui peut blesser, de ce qui divise.
Mais la parole de Dieu nous dit aussi la vérité sur Lui: il est fidèle, il est miséricordieux, il se fait proche de nous, il nous aime. Sa parole a la puissance de nous guérir de notre mal et nous emmène à lui ressembler, à l’imiter.On comprend que la parole de Dieu n’est pas un Livre, elle est une Personne, le Christ vivant au milieu de nous par son Esprit. Laissons-le venir jusqu’à nous, osons l’accueillir jusque dans les zones plus obscures de nos vies. Osons lui dire comme le centurion païen: “Seigneur je ne suis pas digne de te recevoir, mais dis seulement une parole et je serai guéri!” Claude Labrecque, ptre

Rentrée des classes 2009

LA RENTRÉE DES CLASSES 2009
21e dim ord. 2009


Dans les catalogues pour la rentrée des classe...54 variétés de calculette, de souliers de course. Il faut se faire une idée, on est devant beaucoup de choix, Certains de ces choix concernent Dieu aujourd’hui. On entend des vedettes dire:"un jour j'ai décidé que c’était fini ces affaires-là; j’ai cessé de croire en Dieu". On vit à une époque où il n'y a plus d'unanimité, où il faut faire des options personnelles qui nous engagent et nous concernent nous seuls. Une fois que l'influence de notre éducation s’amincit, qu'une certaine naïveté a été secouée par une épreuve ou un scandale... Il arrive qu'un choix se propose à notre coeur: “ est-ce que je continue d'être disciple du Christ, où est-ce que je m'en vais moi aussi du côté d’une mode (la pensée unique)”, qui encourage une certaine indifférence vs la pratique religieuse, surtout une méfiance du judéo-christianisme (la bête noire).

Ça s'est passé aussi du temps de Jésus. Il était très couru. Les gens l'avaient suivi parce qu'il parlait clair, dénonçait des hypocrisie, prenait le parti des plus petits. Jésus était à la tête d’un important mouvement populaire. Mais voici qu'un jour il a demandé aux gens de faire un choix sur sa personne après qu'il se soit présenté comme l'égal de Dieu, qu'il se soit mis au centre de son message. Jésus montrait qu'Il était celui qui réalisait les antiques promesses bibliques, qu'il venait combler les attentes du coeur humain. Il demandait aux gens de communier à son corps et à son sang. Beaucoup furent choqués. Tant que Dieu était loin dans son ciel, qu'on pouvait le prier de temps en temps au temple, en étant bien conscient d'appartenir à un peuple choisi, ça allait toujours! Mais voici que Dieu se manifestait à travers une personne concrète, qui exigeait qu'on fasse clairement une option pour lui, qu'on le suive... cela était pas mal plus engageant. Pour certains ça été intolérable. Jésus a déçu le peuple. Seuls certains intimes qui commençaient à soupçonner le mystère qu’il portait, ont accepté de rester avec lui. Pierre dit à Jésus: "A bien y penser, où est-ce qu'on pourrait aller. Toi seul as les paroles de la vie”. Ce texte nous renvoie de faön semblable à ce que nous vivons chez nous au Québec depuis une quarantaine d’années.

Nous autres aussi nous avions une religion partout présente, un Dieu lointain, mais puissant. On avait conscience de former une collectivité privilégiée: tous des catholiques francophones. Pour rencontrer Dieu il y avait des gestes officiels, des rites et des pratiques que tout le monde faisait. Pas trop engageant peut-être quand tout le monde le fait et que les choix sont limités.

Aujourd'hui c'est différent! Selon mon parcours personnel, ma sensibilité, il y a des questions sur l’Église, sa tradition, ses pratiques, sur certaines paroles d’Évangile qui restent en chantier, pas claires pour moi... comme en suspens. Je ne me fais pas montrer du doigt pour autant, c’est le climat général de nos sociétés pluralistes, climat de liberté qui est une bonne chose, même si c'est moins confortable à court terme pour les paroisses de voir diminuer leurs effectifs. Aller à l'église pour satisfaire une obligation ou pour remplir un rite ça ne tient plus. Les gestes et comportements sociaux se sont déplacés; il y a de nouveaux temples, d’autres grandes surfaces. Ce qui fait dresser l'oreille ou tendre le regard, ce qui inspire ce ne sont plus les exemples de vie ou les valeurs chrétiennes, c'est la nouvelle ligne d'une auto, les derniers gagnants du million, le contrat de telle vedette ou de tel mannequin. Ce sont les nouvelles idoles, qui sont les références de notre époque qui s'interposent et prennent la place.

Nous sommes obligés de faire des choix; Dieu nous a choisis librement comme ses amis, il veut que nous le choisissions librement. Faire ce choix de revenir au Seigneur, c'est une étape de maturité humaine et spirituelle. C'est devenir plus autonomes en sachant ce qu'on fait et pourquoi on le fait. C’est s’ouvrir à l’action de l’Esprit: c’est lui seul qui peut nous mettre sur la même longueur d’onde. Il est en définitive la source de notre acte de foi et de notre engagement à sa suite...

Au moment de recommencer nos activités de l'automne, nous sommes questionnés. Jésus nous dit: Allez-vous vous en aller vous aussi? pour suivre le courant. La question devient pour moi: Est-ce que je vais chercher cette année à mettre le Seigneur au centre de ma vie? Est-ce que je vais me nourrir de sa Parole comme d'une parole de Vie unique en son genre, est-ce que je vais chercher à l'intérioriser. Est-ce que je vais m'approcher du Pain de l'Eucharistie pour alimenter ma relation avec une Personne vivante... En d'autres mots, il faut me décider aujourd'hui pour ou contre le Seigneur, faire le choix de m'impliquer dans son projet. Sinon, ma dévotion, mon enthousiasme, mon désir, mon engagement iront dans d'autres directions, peut-être sans m'en rendre compte vers des idoles sans lendemain. Par ailleurs, la paix et la joie qui m’habitent quand j’accepte de suivre le Seigneur sont les signes que je ne me trompe pas de direction et que je suis en marche vers la Vérité. Qu’en serait-il de ma foi si elle ne comportait pas un certain pari fondé sur l’amour confiant... y a-t-il une autre attitude digne d’une vie chrétienne adulte et responsable?

Claude Labrecque, ptre