vendredi 27 mars 2009

Homélie 3 Carême


HOMÉLIE du 3e dimanche du Carême 09

Nous avons sans doute encore à la mémoire les illustrations des anciens catéchismes en images, des tableaux ou des albums bibliques où l’on voit Jésus comme déchaîné, qui renverse les comptoirs des marchands du Temple, libère les colombes, éparpille par terre les pièces d’argent. Il fait le grand ménage, il fait une sainte colère. "Ce Temple est une maison de prière et non un super-marché" proclame-t-il. Entre Dieu et les idoles, entre Dieu et le marchandage c’est incompatible. Une idole c’est une sorte de divinité qu’on se fabrique, qu’on peut manipuler en achetant ses bonnes grâces. On a envie d’applaudir ce geste prophétique de celui qui par ailleurs est pourtant doux et humble de coeur. La colère des doux est parfois terrible. On sait que Mère Térésa a fait parfois de ces gestes quand on lui offrait des maisons trop cossues pour ses communautés .De ce temps-là on en connaît d’autres qui font des petits ménages (je pense à la Caisse de dépôt ou à Bob Gainey) mais ce n’est pas de cela qu’il est question ici, même s’il s’agit d’argent.....

Si on revient à Jésus, serions-nous prêts à le féliciter s’il venait plus proche de nous pour bousculer certaines de nos routines, de nos images de Dieu, de nos absolus qui n’en sont pas. On entend souvent "moi j’adore" v.g. la ligne de telle marque d’auto, telle émission télé, tel savon ou marque de lessive. Il n’y a que Dieu qu’on puisse adorer. Dans les gestes de Jésus il faut voir la rupture entre son Père et les faux dieux, entre des conceptions de la religion où l’on serait porté à faire du trafic, à mettre Dieu à sa main par une série de promesses. En somme acheter notre salut à force de rites, même de sacrifices. Acheter un contrat d’assurance pour le ciel en "barguinant" pour tant de lampions, de messes ou de chapelets, genre donnant-donnant. Je te donne ça, mais tu me dois ça!

Histoire du type qui devait passer sur une rivière gelée: "si je fais encore 10 pieds, je t’allume un gros lampion, après si je fais encore 10 pieds je te dis une couple de chapelets... si je fais les derniers 10 pieds, je te paye une messe..." Rendu de l’autre bord... il dit à Dieu..."Oublions ça si tu veux!"

Finalement, c’est dans nos coeurs qui sont aussi les temples de Dieu que nous devons renverser les comptoirs de négociation, jeter à terre les idoles. Genre tout s’achète, tout se vend, tout se paye, même avec Dieu. C’est le reflet de nos sociétés où tout est marchandise, qui se transpose dans nos relations avec le Père du ciel. Dieu, pour sa part , est toujours libérateur, jamais vendeur, jamais oppresseur. Ce qu’il offre est gratuit: il n’exige que la foi et l’ouverture confiante de nos coeurs.

Reconnaissons donc qu’il y a encore des veaux d’or élevés au coeur de nos société pour qu’on les adore. Acquérir à tout prix la puissance en accumulant du capital. Ça n’a plus de limite... Jusqu’à vouloir s’enrichir avec les maigres biens des plus pauvres. Cette folie on la voit dans les récents scandales financiers. Dieu dit: " Tu n’auras pas d’autres dieux que moi". Pensons aux dieux de la business, du sexe, du sport. On dit que beaucoup de québécois font du hockey une véritable religion, un culte qui a ses temples, ses fidèles, ses prédicateurs, ses rituels; qui fait toujours les gros titres dans les journaux.. Une religion de l’athlète où, pour répondre aux cris de la foule, on force des jeunes à abréger leur vie. Peu importe, on a acheté à gros prix leurs talents, qu’ils en portent les conséquences pourvu qu’ils donnent de la performance, qu’ils nous mènent au ciel autour de la coupe Stanley.On se croirait dans les arènes aux temps de l’empire romain.
Qu’est-ce qui peut nous libérer de la dictature de ces idoles? C’est la fidélité à l’Alliance avec Dieu "Un seul Dieu tu adoreras". Croyons-nous à ces mots que nous chantons souvent: "Ta parole Seigneur est vérité et ta loi délivrance".De tous temps les fidèles ont tenté d’enfermer Dieu entre les murs des temples qu’ils élèvent et d’agir sur lui par une série de rites efficaces sinon magiques. Quand Jésus nous parle de Temple c’est désormais de son Corps qu’il est question. La résidence de Dieu parmi nous c’est son Corps ressuscité. "Détruisez ce temple et je le rebâtirai en trois jours"... les gens n’ont pas compris, nous avec! Et qui appartient au Christ par son baptême devient à son tour un temple de Dieu. S.Paul nous le redit: "ne savez-vous pas que vos corps sont les temples de l’Esprit-Saint?" Il faisait écho à la parole de Jésus: "Si quelqu’un m’aime, il observera ma Parole, nous viendrons chez lui et nous y ferons notre demeure". Il parlait de sa présence en nous avec le Père et de l’Esprit-Saint.

On comprend que dans le contexte de l’Évangile ce qui est sacré ce n’est pas le marbre, la brique ou le béton, c’est la personne humaine, la demeure intime de Dieu. Si on choisit de l’ignorer on risque de réduire l’être humain à l’état d’une machine, d’un simple matériau ou d’un animal. Alors, on n’a plus aucun scrupule à l’exploiter, à en faire une marchandise. On débouche dans la barbarie comme on voit aux quatre coins de la planète. Notre corps n’est pas une simple enveloppe pour notre âme, un véhicule temporaire, finalement méprisable. Notre corps est un chantier à construire de l’intérieur en lui faisant poser des gestes qui nous grandissent, gestes de partage, gestes d’accueil, gestes de pardon, etc... C’est là que notre vraie personnalité se bâtit jour après jour, jusqu’au moment où notre esprit habitera parfaitement notre corps et nous deviendrons, comme dit s. Paul, des corps spirituels.

Comment est-ce possible? C’est suite à l’incarnation de Dieu dans un corps humain comme le nôtre. Jésus a pris sur lui toutes les limites liées au mauvais usage de notre liberté et à la faiblesse de notre volonté. Il a vaincu et entraîné dans la mort sur la croix tout le péché, pour renaître comme l’Homme nouveau, tel que nous sommes appelés à devenir. Jésus a rendu ainsi possible notre relation avec le Père qui donne sens à notre vie; de lui nous recevons notre véritable identité de fils/filles bien-aimés.

S’il y a des retards sur notre route, il nous donne son Esprit pour nous remettre sur pied. En Jésus il nous confie un modèle à suivre. Nous avons raison de dire au cours de ce Carême: Dieu nous aime, marchons à la suite de Jésus.

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